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Théodore Illion, Au Tibet Secret

Théodore Illion, Au Tibet Secret

 

Theodore Illion ou Theodor Illion, né en 1898 au Canada (?), mort le 4 septembre 1984 à Hallein dans le land de Salzbourg, est un auteur de livres de voyage qui prétendit être parti au Tibet et y avoir découvert une cité souterraine. Il publia ses aventures tibétaines sous ce nom, mais par la suite employa les pseudonymes Theodor Burang ou Theodore Burang et, plus rarement, Theodor Nolling pour écrire divers livres et articles sur la médecine tibétaine.

Wikipedia

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Au Tibet Secret : Deux types de spiritualités s’opposent en ce monde

Table des matières
  • Sur les foules et leur influence pernicieuse
  • Sur la réincarnation / la vie après la mort / les corps subtils
  • L’ignorance des lamas et la transposition de leurs attitudes matérielles dans le domaine du spirituel
  • Structure de pouvoir des lamas / consommation de viande séchée / types de chasteté
  • Les amours des lamas / La dévotion des pèlerins / La crainte des mauvais esprits
  • Système économique des lamas / Divinités pour la pluie et le beau temps / La vraie religion est amour
  • Les pèlerins égoïstes / Les pèlerins craintifs / Le mélange de religion et de commerce des lamas.
  • Où est l’esprit du Bouddhisme de nos jours ? / Histoire de la corruption du Bouddhisme mis au service d’une hiérarchie
  • Bouddhisme comme appareil du pouvoir / Habitudes hautaines des Lamas / Charlatanisme des Lamas
  • Anecdotes sur les lamas charlatans / L’utilité de la méditation pour un lama
  • Détails sur les méditations compliquées et insensées des lamas / La vie des ermites est elle-même une méditation.
  • La méditation comme symptôme d’une spiritualité corrompue
  • La méditation des lamas et les pensées luxurieuses
  • La méditation d’empathie envers tous les êtres souffrants est artificielle / Erreur de la séparation matière/esprit
  • Les ermites spiritualisent la matière / Les hommes sont plongés dans des rêves narcissiques / Médecine Tibétaine
  • La médecine Tibétaine, le contraire de la médecine occidentale / Mêmes excès, mêmes erreurs
  • Les hommes sages du Tibet ne partagent pas leurs remèdes
  • L’accident d’un jeune homme et l’intervention miraculeuse d’un homme sage
  • Discussion avec l’homme sage / A quoi sert-il de soigner si les leçons ne sont pas apprises ?
  • On récolte ce que l’on sème / Ceux qui ouvrent contre les guerres fuient leurs propres faiblesses / Amour faible vs. Amour fort
  • Principes non-hiérarchiques de coopération parmi les ermites / Les faux-ermites qui recherchent un prestige égoïste
  • Isolement et interactions des ermites avec la société / Faux et vrais ermites / Causes des souffrances du monde
  • Les possessions / La vie est tout ce dont nous avons besoin / Les ermites mangent peu / La lecture de pensée
  • Si la lecture de pensée était commune… / Ne pas utiliser des facultés superphysiques pour le physique / La tentation sexuelle est une mauvaise utilisation de l’énergie sexuelle qui est créatrice
  • Luxure réprimée par égoïsme / Ombre et lumière s’entremêlent dans les apparences / Juger les autres / Vivre son enseignement
  • L’autorité naturelle est ermites, l’autorité artificielle des lamas / Résistance au froid des ermites
  • L’égocentrisme maintient l’organisme dans un état psychique et physique de contraction
  • Utilisation des pouvoirs surnaturels par les saints et lamas / Les recherche de pouvoirs psychiques des lamas
  • Les lamas volants / Les preuves photographiques de phénomènes psi sont inutiles / Fantômes
  • Le développement forcé de pouvoirs occultes mène à l’effondrement / Les occultistes tibétains / Clairvoyance et clairaudiance
  • Aura et clairvoyance / Réalité des phénomènes psychiques / Influence hypnotique des foules
  • La météo trouble les phénomènes psi / Sur le scepticisme / Trucages
  • Attitude des foules envers les lamas / L’arnaque des chaussures « miracles » vendues par les lama
  • Les tibétains constamment dupés / Pouvoir moral des lamas
  • Ce qu’est la jeunesse / Pourquoi les hommes vivent plus longtemps mais perdent leur jeunesse plus rapidement / Les ermites sont toujours jeunes
  • Vie avec les ermites / La jeunesse est détruite par la peur, la peur venant du service-de-soi
  • Ce qu’est la liberté / Combattre les symptômes de l’égoïsme n’apporte aucune amélioration / Brothers and Sisters of Sorrow (Frères et Soeurs de la Peine)
  • La vie vaut-elle la peine d’être vécue ? / Que faire pour le monde ? Réponses de style Marciniak / Tout ce qu’il faut est de comprendre
  • Le repas des ermites / L’utilisation insensée du progrès par la civilisation
  • Matière et Esprit : toujours des excès / Les faux ermites de l’île du lac qui fuient la Matière
  • Les idéalistes narcissiques / Les gens qui essayent d’être bons sans être conscients / Les ermites ne souhaitent rien, ils ont tout
  • Le savoir et la sagesse / La civilisation occidentale, bonne ou mauvaise ? / Méfiez-vous de ceux qui se disent « bons »
  • Ne jamais être satisfait / La vérité ne peut être qu’objective / Le piège de l’arrogance spirituelle / Les hommes sages ne font pas d’efforts pour paraître « gentils » / Respect du libre-arbitre
  • L’homme crée ses propres limites / Le temps provient de limites apportées par le service-de-soi / Le faux et le vrai Nirvana : ce n’est pas une annihilation mais un changement de conscience
  • Tout est en nous / Le systèmes et les dogmes corrompent la lumière / Les signes des temps, le choix offert à l’humanité
  • Fin

 

Sur les foules et leur influence pernicieuse

 

Au Tibet l’observation réelle et personnelle est la source d’information la plus sûre et alors même, une grande prudence est nécessaire. On ne devrait jamais se mêler aux foules en regardant des phénomènes au Tibet. Je n’aime jamais me mêler aux foules et j’évite cela à chaque fois que je le peux, pas uniquement en Orient, mais aussi en Occident. Au milieu d’un attroupement de centaines de personnes qui finissent par tous penser dans les mêmes bornes, avez-vous déjà essayé de former des pensées diamétralement opposées aux idées de la foule ? Même un observateur sceptique et objectif est pour le moins inconsciemment influencé par son environnement, et surtout par une foule. Les lamas au Tibet se réjouissent toujours des foules. Plus il y a de monde, plus les choses semblent faciles pour le sacerdoce bouddhiste. Les lamas détestent ceux qui pensent de façon indépendante. Ils ont besoin de troupeaux.

 

On m’a dit que vingt pour cent de la population du Tibet était composée de prêtres et moines. Le Tibet est-il un lieu plus pieux et plus juste que le reste du monde grâce à l’existence de tant de lamas pour qui aider les autres est devenu une profession ? [pages 18-19]

 

Sur la réincarnation / la vie après la mort / les corps subtils

 

Parmi les lamas, certains affichent une compréhension concernant les choses profondes. Selon les lamas que j’ai entendu prêcher sur ces sujets, un être humain est triple et se compose de trois parties, à savoir : (a) son corps grossier ; (b) un corps subtil invisible lié avec le corps grossier et continuellement modifié et influencé par les sens ; et (c) l’âme individuelle, qui est une partie de l’esprit pénétrant l’univers entier, inaltérable et incorruptible de par sa nature même.

 

Quand une personne meurt le corps subtil invisible, avec l’âme individuelle, quitte le corps grossier. Moins la personne qui décède a un esprit matériellement orienté, plus le processus d’abandon du corps grossier est facile. Mais les lamas indiquent que presque toutes les personnes, au moins à un certain degré, ont un esprit tourné vers le matériel, et il est conseillé, de ce fait, d’appeler un lama lorsque quelqu’un est sur le point de mourir, puisque ses pieuses chansons et prières, sa récitation de mots magiques, et le fait de taper sur le haut de la tête de la personne mourante sont censés faciliter le processus douloureux de la sortie du corps physique.

 

Pendant la vie, les pensées et sentiments influencent continuellement le corps subtil invisible et après la mort il reste empreint de toutes ces impressions.

 

C’est ce corps subtil, de pair avec l’âme, qui va au paradis ou en enfer selon les péchés et mérites du défunt. Là-bas, un lent processus de désintégration se produit. Toute pensée, mot, ou action bienfaisante ou malfaisante durant la vie a laissé des impressions sur le corps invisible, et ces impressions doivent êtres retirées après la mort par la souffrance ou la joie. Au cours de ce processus qui est censé ’régler les comptes’, le corps invisible se désintègre de plus en plus, jusqu’à ce que rien d’autre ne reste à part l’âme inaltérable et incorruptible, qui fait partie de l’âme-du-monde et reste, retourne à nouveau sur terre pour entrer dans le corps d’un nouveau-né.

 

J’étais curieux de savoir ce que les lamas pensaient de l’aspect et de la constitution réelle du corps subtil invisible. Comme je n’ai parlé qu’avec des personnes ordinaires et des ermites tibétains (je parlerai d’eux dans les deux derniers chapitres de ce livre), et que je ne me suis jamais adressé aux lamas, puisque cela est bien plus dangereux que tous les enfers froids et chauds réunis, j’ai dû écouter les nombreux discours des étudiants et parfois des conversations entre les lamas eux-mêmes pour en savoir plus sur le sujet.

 

Cependant, il me semble que lorsque les lamas ne parlent plus du corps subtil invisible de manière vague, mais qu’ils commencent à fournir des détails, leurs descriptions concrètes de son aspect et de ses caractéristiques réelles varie beaucoup. Un lama que j’ai entendu (…) [p.102-103]

 

L’ignorance des lamas et la transposition de leurs attitudes matérielles dans le domaine du spirituel

 

(…) parler déclara que le corps subtil invisible était composé d’éthers invisibles qui circulent à grand vitesse, tellement vite, en fait, que cela « faisait tourner la tête d’un clairvoyant ». Les éthers invisibles circulent dans un très grand nombre de petits vaisseaux qui s’étendent autour d’un centre commun.

 

Lorsqu’un élève a demandé combien de tels vaisseaux existaient, le lama a répondu : 72,000. Mais je me suis nettement rappelé d’un autre lama ayant précisément répondu à la même question, et ayant dit que le nombre de vaisseaux dans le corps subtil s’élevait à 7272 bum (1 bum = 100,000), c’est-à-dire 727,200,000.

 

En réponse à la question des étudiants qui demandaient où est situé le centre des vaisseaux, la réponse donnée par divers lamas de différents monastères était loin d’être identique. Un lama disait qu’il était dans le coeur, un autre disait qu’il était dans le nombril, un autre disait que le centre se déplaçait selon les diverses caractéristiques corporelles de l’individu en question !

 

Devant l’existence de toutes ces contradictions, il n’est guère étonnant que la plupart des lamas adoptent une manière abstruse et ambigüe d’exprimer leurs pensées, et compliquent des sujets à chaque fois que les étudiants commencent à demander des questions concrètes. Les hommes sages du Tibet sont différents. Leurs réponses sont toujours simples et directes. Ils n’essayent jamais de compliquer les sujets. Dans la plupart des cas le fait de compliquer est uniquement un recours pour ceux qui sont soucieux de dissimuler leur ignorance, ou qui veulent berner ou profiter des autres.

 

Le lecteur ne doit pas penser que la majorité des lamas sont intéressés par l’étude approfondie de ces choses. Ceux qui abordent de telles questions sont seulement une petite minorité. La plupart des lamas sont très ignorants. Tout ce qu’ils peuvent dire aux gens est de recommander de murmurer aussi souvent que possible les quatre mots saints, « Om Mani Padme Hum« , parce qu’à chaque fois que ces six syllabes saintes sont murmurées « un millier de péchés vous sont pardonnés ». En dehors du fait de murmurer la sainte formule, la confession des péchés est une pratique largement répandue dans les monastères tibétains et, étant donné les manières commerciales et terre-à-terre des lamas, je n’ai aucun doute qu’ils autoriseront sans hésiter la confession par téléphone dès que le Tibet aura un réseau de communication téléphonique étendu. Peut-être qu’il y aura des frais supplémentaires pour la confessions des péchés au mkhan-po (l’abbé) directement, cette méthode de confession étant considérée comme un petit peu plus efficace par les tibétains.

 

Souvent les abbés de monastères tibétains sont d’anciens hommes d’affaires ou gouverneurs locaux, et même, dans certains cas, d’anciens brigands ! Après être devenus abbés, ils font un effort pour être bon et vertueux parce qu’ils pensent que cela rémunère spirituellement d’être bon et vertueux. Ils transplantent ainsi leur attitude matérialiste de possession et d’acquisition (…) [p.104-105]

 

Structure de pouvoir des lamas / consommation de viande séchée / types de chasteté

 

(…) dans la sphère spirituelle – une illusion courante pour nombre de personnes qui se prétendent spirituelles.

 

Les abbés ont des pouvoirs étendus. Ils veillent à ce que les moines se comportent correctement et qu’ils ne se lient pas avec des femmes. C’est l’abbé qui distribue les biens du monastère, qui sont parfois considérables, puisque la population de chaque district voisin est forcée de payer presque la moitié de son salaire comme taxe pour le monastère, dont les dirigeants ne semblent dans la plupart des cas ne pas se soucier ’pour un sou’ des autres autorités tibétaines, de sorte qu’il y a souvent un véritable état dans l’état. C’est l’abbé qui s’occupe de la distribution de nourriture dans un grand dépôt existant dans la plupart des monastères, principalement fourni en viande séchée. La viande séchée se garde des années, ne nécessitant pas de méthode particulière de conservation.

 

Le principal aliment dans la plupart des monastères est la viande séchée et pourtant, pour les bouddhistes il est formellement interdit de manger de la viande !

 

Cela semble être une contradiction, mais au Tibet les lamas disent toujours vrai. Ils ont une collection de livres saints de 108 volumes, chaque volume pèse à peu près 4 kilos et demi. Donc il n’est pour eux pas difficile de trouver des textes adéquats pour excuser tout ce qu’ils font en prenant à la lettre leurs écrits religieux compliqués et en ignorant l’esprit de ces derniers.

 

Les lamas ne peuvent pas dénier ce qui est dit et redit dans les écrits saints bouddhistes : « Tu ne dois pas tuer. Tu ne dois manger aucune viande. » Mais néanmoins, ils mangent de la viande. Ils disent simplement que « si un homme veut tuer des animaux pour la nourriture il devrait demander à un prêtre d’être là lorsque l’animal est tué. Ainsi le péché de tuer lui sera pardonné. »

 

Je devrais ajouter à ce propos que pratiquement tous les hommes sages du Tibet, qui dans leurs humbles logis n’ont pas un seul texte religieux, mais qui vivent dans l’esprit du Bouddha vivant, sont végétariens. Ce n’est possible, bien sûr, que pour les tibétains qui s’arrangent pour vivre avec de très, très petites quantités de nourriture.

 

Dans la plupart des cas aucune femme – sauf les vieilles nonnes aux têtes rasées – ont la permission d’entrer dans un monastère, et même lorsqu’elles quittent le monastère pour peu de temps, l’indulgence normale envers le sexe féminin est très difficile pour les lamas. Il y a des exceptions, surtout dans le cas de lamas bonnets-rouges qui ont même le droit de se marier, mais la secte la plus puissante, qui a de loin le plus grand nombre d’adhérents, la secte des bonnets-jaunes, est très stricte dans l’application de la chasteté et rend tout contact avec des femmes impossible.

 

Mais il y a beaucoup de choses qu’un Occidental qualifierait de contre nature dans les murs d’un monastère tibétain. Ceux qui ont voyagé en (…) [p.106-107]

 

Les amours des lamas / La dévotion des pèlerins / La crainte des mauvais esprits

 

(…) Orient savent que le point de vue oriental est bien plus indulgent que le point de vue occidental. Le nombre de lamas ayant formé un certain type d’union avec un plus jeune lama semble considérable, et dans certains monastères l’état des lieux pour ce domaine est tel que même un pèlerin solitaire n’est pas à l’abri d’invitations explicites adressées par de jeunes lamas. Bien qu’il serait excessif de dire que ces pratiques sont la norme, il est avéré qu’elles sont assez fréquentes.

 

Une fois, alors que je marchais en compagnie de quelques pèlerins nous avons vu une chose devant laquelle un occidental répèterait « Choquant ! » plusieurs semaines d’affilée. Les tibétains étaient à peine dérangés. Alors qu’ils en discutaient calmement, je taisais évidemment mon opinion, puisque je ne devais jamais ouvrir ma bouche dans l’enceinte d’un monastère.

 

« C’est quelque chose d’inhabituel, » remarqua l’un des tibétains calmement.
« Je n’ai jamais pensé que les lamas pouvaient faire une telle chose, » a répondu un autre.
« N’oubliez pas, » ajouta un troisième pèlerin, « que les lamas sont très sages. Même s’ils font quelque chose qui nous semble étrange, ils le font pour le bien du monde. »
« On m’a toujours dit de ne pas trouver de vice dans les agissements des lamas, » a dit le premier pèlerin.
« Peut-être que les deux lamas sont très saints, » répondit le troisième. « Ils étaient trop près du nirvana et comme ils voulaient rester dans leurs corps pour pouvoir aider le monde, ils ont volontairement commis un péché dans un esprit de sacrifice. »

 

Un silence dévot succéda à la conversation. Les pèlerins tibétains paraissaient très penauds et crédules et j’eus peine à dissimuler mon amusement.

 

Il semble improbable que les lamas dissimulent des femmes dans les monastères. En particulier, l’existence de femmes blanches enamourées à des centaines de lamas d’apparence crasseuse avec qui elles vivraient, semble excessivement improbable. Je me demande parfois quelle tête ferait un lama s’il rencontrait une jolie jeune fille Européenne ou Américaine dans un monastère. Il la confondrait probablement avec un fantôme.

 

La plupart des tibétains ont terriblement peur des mauvais esprits et des fantômes des gens de leur peuple. Quand les fantômes font beaucoup de méfaits, les lamas sont supposés être les seuls qui puissent offrir une aide en les chassant par des incantations magiques et des prières. Il y a d’innombrables mauvais esprits, des milliers, mais ils peuvent être classifiés, il y a 360 variétés différentes. Pour cataloguer tous ces mauvais esprits, apprendre tous leurs noms et caractères maléfiques et savoir quelle est la meilleure (…) [p.108-109]

 

Système économique des lamas / Divinités pour la pluie et le beau temps / La vraie religion est amour

 

(…) méthode pour les combattre, nombre de jeunes prêtres tibétains font des études absorbantes sur cette importante question. Ils ont fait de leur connaissance des fantômes une structure scientifique imposante qui impressionne beaucoup les masses ignorantes.

 

Comme environ vingt pour cent de la population du Tibet est constituée de prêtres et de moines, il est assez difficile pour toutes ces personnes de vivre. Quand les taxes prélevées par les prêtres, les redevances pour les prières et exorcismes, les revenus de rites funéraires, les ventes de talismans, et les cadeaux de nombreux pèlerins ne sont pas suffisants pour continuer à subvenir aux besoins des lamas, ils inventent une Divinité locale ayant un tempérament difficile et particulièrement courroucé qui doit être continuellement apaisée pour tenir à distance du district en question les influences maléfiques. Les personnes vivant là fournissent naturellement les dépenses de ces pratiques d’apaisement considérées comme absolument nécessaires par les prêtres « dans les intérêts de la population ».

 

Les lamas exploitent même les enfants. Lorsqu’ils ont environ huit ou dix ans les futurs prêtres sont envoyés aux monastères. Selon les idées tibétaines un garçon est suffisamment âgé lorsqu’il est assez grand pour effrayer un oiseau d’une taille moyenne. Les enfants venant de familles aisées sont traités gentiment, mais ceux de familles pauvres sont souvent maltraités et envoyés à l’extérieur par leurs maîtres pour mendier, l’argent qu’ils récoltent est ensuite retiré par les maîtres. On ne peut imaginer Bouddha traiter un garçon pauvre d’une différente manière qu’un garçon d’une famille riche, mais « ses » prêtres le font fréquemment. Leurs prières sont souvent égoïstes. Bouddha lui-même n’aurait pas pu recommander de prier à des fins égoïstes, puisque cela fait de la religion une mascarade.

 

Lorsque un district agricole du Tibet est menacé par la sècheresse, les fermiers payent une somme à quelques centaines de prêtres pour organiser des processions de prières pour la pluie, mais des gens construisant des maisons dans le même district veulent du beau temps pour continuer les travaux, et payent une autre somme à d’autres prêtres de sorte qu’ils prient pour du temps sec. Ainsi des centaines de prêtres prient simultanément pour un temps de pluie et de sècheresse, ce qui doit mettre leurs dieux dans une position très embarrassante, puisqu’en dépit de tous leurs pouvoirs ils ne peuvent pas apporter de la pluie et du soleil en même temps.

 

Nous pourrions en rire, mais beaucoup de personnes civilisées en Occident font précisément la même chose. La vraie religion est amour. Cela n’a rien à voir avec de telles comédies. Celui qui vit dans l’esprit de sa religion, pas seulement cinq minutes par semaine après avoir écouté des sermons enthousiasmant mais à chaque moment de sa vie, n’a pas de Dieu qu’il essaye d’amadouer et soudoyer ; il n’a pas « son » Dieu qu’il tente d’utiliser comme arme contre son voisin.

 

Beaucoup de lamas tibétains ont leur propre Divinité dont ils gardent le nom secret, – leur propre dieu, je vous rappelle – (…) [p.110-111]

 

Les pèlerins égoïstes / Les pèlerins craintifs / Le mélange de religion et de commerce des lamas.

 

(…) avec qui ils veulent garder le monopole du contact !

 

C’est ce type de prêtre tibétain qui n’est pas toujours aimable dans les petites choses de sa vie quotidienne. La même chose est valable pour les nombreux pèlerins qui avancent en se jetant à plat au sol tous les deux mètres et qui couvrent parfois des distances d’un ou deux cent miles anglaises [160 à 320 kilomètres] en se jetant au sol tous les deux mètres. Mais malheur au pèlerin qui tombe malade durant un tel pèlerinage ! Ses pieux confrères pourraient le laisser derrière eux sans lui apporter aucune aide. Il n’y a pas de texte ordonnant formellement à un pèlerin d’aider un autre pèlerin qui tombe malade en route. Et chaque fois qu’il se jette lui-même au sol, un pèlerin tibétain, si je puis dire, attend une sorte de mérite dans son registre de vertus. Il a très peur, par conséquent, d’interrompre ses exercices rampants méritoires, quoi qu’il arrive.

 

Les pillards tibétains ne se jettent jamais sur le sol pour obtenir des mérites. Ils ne font aucun effort pour être bon, contrairement aux pèlerins, ils n’imaginent même pas être bons. Toutefois, si un membre d’un gang de pillards tibétains tombe malade en route, il n’est pas abandonné derrière les autres sans aucune aide, il reçoit une assistance.

 

Les pèlerins tibétains, dans l’ensemble, semblent très penauds. Ils voyagent généralement en bandes, puisqu’ils craignent les brigands et les esprits.

 

Une fois, un groupe de ces vingt-cinq pèlerins se sont sauvés lorsqu’ils m’ont vu approcher dans les solitudes isolées du mystérieux Tibet. Ils étaient grandement terrifiés de voir un homme seul qu’ils ont évidemment pris pour un fantôme. Plus vite j’approchais, plus vite les vingt-cinq adultes se sont enfuis. Je me suis vraiment senti dans la peau d’un géant qui déroute une armée entière.

 

Seul un pèlerin peut entrer dans quasiment tous les monastères du Tibet. Même un permis accordé par le Gouvernement du pays ne permet pas à un explorateur d’entrer dans tous les monastères, surtout ceux qui sont loin de la capitale. Mais les pèlerins sont toujours bienvenus, puisque les lamas ne rejetteraient jamais de client potentiel.

 

Au fil des siècles les lamas ont créé un mélange curieux de commerce et religion. Le jour où le Tibet introduira une industrie dans les rangs occidentaux les lamas n’hésiteront probablement pas à mettre en place d’entières séries de moulins à prière électriques et commencer un commerce d’abonnement à grande échelle. Ils sont si matérialistes que lorsque les textes religieux sont très longs ils font lire à des douzaines de lamas plusieurs douzaines de pages en même temps, chaque lama lisant une page différente.

 

Ainsi, à part quelques très peu nombreuses exceptions, seul la lettre du Bouddhisme règne et non son esprit. [p.112-113]

 

Où est l’esprit du bouddhisme de nos jours ? / Histoire de la corruption du Bouddhisme mis au service d’une hiérarchie

 

De nos jours, l’esprit du Bouddha vivant est généralement à chercher en dehors des monastères, parmi certains ermites tibétains dont je parlerai dans les deux derniers chapitres de ce livre, mais de ci de là il reste quelques prêtres qui maintiennent en vie l’esprit du Bouddha vivant dans les monastères. Dans la plupart des cas ces hommes sincères sont traités comme des hérétiques par leurs confrères, bien plus commerciaux.

 

En les comparant à certains lamas qui restent sincères et entiers, on mesure à quelle distance les autres ont quitté l’esprit des enseignements du Bouddha. « Les rites et cérémonies sont inutiles, » a enseigné Bouddha. « Utiliser des pouvoirs occultes pour guérir ou exorciser est une grande erreur religieuse. » Ce passage se trouve dans les anciens écrits bouddhistes authentiques. Il n’est pas étonnant que la plupart des lamas n’aiment pas la présence d’hommes qui peuvent leur rappeler de tels faits.

 

Une nourriture spécialement consacrée est conservée dans de nombreux temples. Les lamas distribuent parfois des pilules faites de riz, de beurre, et farine, et ils affirment que de tels rites magiques assurent un contact rapproché avec les Divinités. Bien que le Bouddha historique n’a jamais dit qu’il était divin et ne parlait que du divin en l’homme, le divin qui est potentiellement dans le coeur de chaque être humain, le Bouddhisme dogmatique a non seulement transformé le Bouddha lui-même en un dieu mais aussi ses proches. Le Bouddhisme lamaïste a développé l’adoration de la Mère de Bouddha. Dans de nombreux monastères il y a des statures de la Mère lamaïste de Dieu tenant son enfant Bouddha dans ses bras. Cette adoration de la Mère de Bouddha fut progressivement élaborée par le sacerdoce Bouddhiste au travers des âges. Aucune trace de cela ne peut être trouvé dans les premiers siècles du bouddhisme.

 

Il n’y avait absolument aucune hiérarchie religieuse durant les quelques premiers siècles qui suivirent la mort de Bouddha. Il y avait seulement quelques faibles leaders qui tentaient de maintenir en vie l’esprit de son enseignement face au charlatanisme religieux montant destiné à tuer son esprit et fausser ses paroles dans le but de construire un système, dans des buts égoïstes et d’exploitation spirituelle.

 

Et il n’y a pas eu de successeur de Bouddha pendant les premiers siècles après sa mort. Il n’y avait pas non plus d’ordre hiérarchique parmi les leaders du groupe.

 

Ce fut seulement après la victoire du Mahayana que ses soi-disant successeurs et « vice-dieux » apparurent. Le Mahayana se basait sur la supposition que le « message réel du Bouddha était trop pur et trop élevé pour avoir une chance d’être rapidement accepté par les masses », et qu’en conséquence une sorte de « bouddhisme édulcoré » devrait être créé pour les masses populeuses, afin d’assurer la victoire rapide du bouddhisme en tant que système.

 

Ce fut fait. Et le Bouddhisme s’est étendu (…) [p.114-115]

 

Bouddhisme comme appareil du pouvoir / Habitudes hautaines des Lamas / Charlatanisme des Lamas

 

(…) sans problème, mais ce n’était plus le bouddhisme de Bouddha.

 

Si Bouddha avait vraiment l’intention de créer une religion dogmatique et une croyance organisée, pourquoi n’a-t-il pas écrit lui-même ses lois ses terre ? Un homme du génie de Bouddha et éduqué en fils de roi savait certainement écrire !

 

Mais les plus grands initiateurs du passé n’ont jamais laissé une ligne. Ils ont probablement réalisé le fait que des réalités vivantes ne peuvent pas être retenues prisonnières dans des textes.

 

Le bouddhisme organisé, tel qu’il se positionne aujourd’hui, est un appareil formidable pour l’exercice du pouvoir et l’exploitation par la peur et la crédulité, en particulier pour le « bouddhisme » tel qu’il existe au Tibet et Népal.

 

La religion fut pervertie pour asseoir de plus en plus l’autorité de ses représentants.

 

Les lamas sont supposés tout savoir. Lorsqu’un tibétain veut un conseil il se rend chez les lamas. Même dans les domaines liés à l’amour et au mariage les lamas sont consultés, et ensuite, dans bien des cas, les tibétains rejoignent les lamas célibataires de la secte des bonnets-jaunes qui interdisent strictement de fréquenter les femmes.

 

Les tibétains, dans l’ensemble, aiment qu’on leur dise ce qu’ils doivent faire. Ce qui empêche de réfléchir inutilement. Les lamas profitent beaucoup de cette attitude.

 

Lorsqu’un tibétain pose une question à un lama et que ce dernier ne sait pas quoi dire, le lama agit souvent comme un médecin occidental. Je sais quand ils sont incapables de diagnostiquer une maladie. Ils font un effort pour paraître très sage sans rien dire.

 

Lorsqu’on leur demande un conseil sur un cas compliqué et difficile, les lamas se comportent comme certains avocats occidentaux à qui l’on demande une opinion sur un problème légal incertain et compliqué : ils parlent beaucoup sans rien dire de précis.

 

Les lamas sont assez délicats et s’arrangent toujours pour ne pas faire aux autres quelque chose de déplaisant sans que cela ne diminue leur autorité.

 

Voici le compte-rendu textuel, traduit librement en anglais, de trois conversations que j’ai entendu au Tibet :

 

I

 

Le demandeur est allé voir un lama, qui, comme beaucoup d’autres prêtres tibétains, avait la réputation d’être clairvoyant. Il souhaitait savoir ce qu’il arrivait à l’un de ses proches qui vivait loin.

 

Demandeur : « Va-t-il bien ? »
Lama : « Son état n’est plus tout à fait le même qu’il y a un certain temps. »
Demandeur : « Dois-je le revoir ? »
Lama : « Cela dépend des dieux. » [p.116-117]

 

Anecdotes sur les lamas charlatans / L’utilité de la méditation pour un lama

 

II

 

Conversation entre un lama et un tibétain qui aimerait savoir quelque chose sur son frère qui vit dans un village, à une centaine de miles de distance.
Lama : « Je suis presque certain que vous avez reçu des nouvelles de lui à l’instant, n’est-ce pas ? »
Client : « Non, Saint Père, je n’en ai pas reçu. »
Lama : (avec un calme impavide) : « Eh bien, dans ce cas vous en aurez bientôt ! »

 

Client : « Je vous serais toujours reconnaissant. »

 

III

 

Un tibétain doté d’un esprit critique vient voir un lama pour protester.
Client : « Le mois dernier nombre d’entre vous, révérends lamas, avez offerts des prières pour la pluie. Puis il a plu. »
Lama : « Bien sûr qu’il a plu. Nous avons prié pour la pluie et les dieux ont daigné répondre à nos prières. »
Client : « Mais cette fois nous vous avons encore apporté beaucoup de beurre, en vous demandant de prier pour la pluie. Et cette fois il n’y a pas eu de pluie du tout. »
Lama : « Vous ne pouvez pas mettre en doute la volonté des dieux. Les dieux savent toujours mieux. »
Client : « Alors que devons-nous faire ? »
Lama : « Nous rapporter davantage de beurre et nous prierons à nouveau. »

 

La méditation est largement pratiquée au Tibet. Il est aisé de décrire un lama en méditation, mais il est beaucoup plus difficile de deviner ce qu’il se passe derrière son visage inanimé.

Un lama en méditation est assis immobile avec les jambes pliées et les bras croisés. Il garde ses yeux fermés. Son visage est extrêmement pâle et frêle. Celui-ci ressemble plus souvent à une statue de cire qu’à un visage d’homme, il est complètement incolore et inanimé. Dans cette position le lama reste assis de nombreuses heures, et dans des cas exceptionnels il reste ainsi de nombreux jours d’affilé. Plus un lama s’arrange pour rester dans un tel état de méditation, plus sa réputation de sainteté est grande. Donc, on pourrait soupçonner que ces lamas futés et pratiques restent dans cette position sacrée bien plus de temps que nécessaire pour avoir de pieuses contemplations.

 

Que se passe-t-il dans la tête d’un lama qui médite ? Quel est l’objet de sa contemplation ?

 

Nombre de lamas sont très ignorants et je ne peux pas m’empêcher de penser qu’ils ne pensent pas du tout lorsque (…) [p.118-119]

 

Détails sur les méditations compliquées et insensées des lamas / La vie des ermites est elle-même une méditation.

 

(…) ils sont en contemplation. Leur état de méditation pourrait viser à un simple et méritoire état d’isolation et de jeûne, et leurs contemplations pourraient ne rien leur amener du tout. Cependant, les lamas ne partagent pas tous ce point de vue. Certains prêtres Bouddhistes ont un objectif très défini dans la tête lorsqu’ils méditent, à savoir la concentration et l’accumulation d’énergie spirituelle.

 

Je dois avouer que toutes mes observations dans les monastères tibétains, où je maintiens toujours l’attitude soigneuse d’un pèlerin sourd-et-aveugle, ne m’ont jamais apporté de vraie clef pour comprendre le but et le mécanisme de ces exercices de méditation. Ce ne fut que lorsque j’ai rencontré un homme sage du Tibet, dont je parle dans les Chapitres VI et VII de ce livre, que j’ai obtenu de précieuses allusions à ce propos.

 

Les ermites sages du Tibet considèrent ces exercices de contemplation pratiqués par les lamas comme une fausse méthode d’acquérir la spiritualité. La spiritualité selon eux doit être le fruit d’une attitude intérieure de l’homme envers la vie. Cela doit être spontané, et pas « acquis » par une méthode ou pratique quelconque. Les hommes sages du Tibet ne prennent jamais de position spéciale pour méditer. Ils ne s’agenouillent jamais, et n’ont pas de position spécifique pour prier. Les hommes sages du Tibet ne prient pas sauf en certaines occasions. Leur vie entière est une prière.

 

Les lamas, en revanche, ont construit un système de prière et méditation élaboré qu’ils compliquent de plus en plus. Voici une liste de certains de leurs états sacrés de méditations pratiqués dans les monastères. Veuillez noter que cette liste de contemplations n’est même pas complète. Il y en a des milliers d’autres.

 

La contemplation qui a de réelles caractéristiques majestueuses et victorieuses.

La contemplation progressive à la poursuite de principes sacrés.

La contemplation qui emplit généreusement tous les cieux.

La méditation indestructible.

La méditation qui ne cesse jamais.

La contemplation de l’immobilité absolue.

La méditation inépuisable.

La contemplation lumineuse.

La contemplation qui apporte de la joie.

 

La méditation qui traverse tous les objets de la perception sensorielle.

La méditation qui élimine tous les doutes d’une manière radicale.

La méditation qui est au-delà de l’effet de toute joies et peines.

La méditation hautement instructive du Lion.

La méditation victorieuse de la Lune majestueuse.

La contemplation qui crée une lumière rayonnante.

La méditation qui n’est à la recherche de rien.

La contemplation sans activité intellectuelle.

La contemplation de la brillance immaculée.

La contemplation de la lumière incommensurable.

La contemplation tout-éclairante.

La méditation de la sagesse majestueuse.

La contemplation qui ne laisse aucun choix possible.

La méditation qui ne s’obscurcit jamais.

La méditation transcendant toute forme d’existence.

La contemplation qui a découvert une expression perceptible, (.) [p.120-121]

 

La méditation comme symptôme d’une spiritualité corrompue

 

(…) La méditation de l’immobilité consciemment désirée de l’intellect.

La méditation de l’ultime libération et du non-attachement.

La méditation qui apporte la liberté de l’attachement aux choses vulgaires.

La contemplation menant au détachement des choses terrestres,

Et cætera et cætera. Sans doute l’énumération de toutes ces différentes formes de méditation, avec plusieurs centaines d’autres non incluses dans la liste ci-dessus, donne au prêtre bouddhiste du Tibet la réputation d’être un homme très savant. De toute évidence, les lamas aiment compliquer les sujets d’étude.

 

Quelle différence il y a avec les hommes sages du Tibet ! Ils ne compliquent jamais les choses.

 

« La vraie méditation, » m’a dit un homme saint – qui, soit dit en passant, ne s’est jamais lui-même dit saint – « la vraie méditation est une chose naturelle, qui ne demande pas d’effort, ce n’est pas une lutte destinée à éliminer toutes les pensées qui sont en conflit avec celles que l’on veut retenir à un moment précis, dans le but d’obtenir quelque chose en retour grâce à la méditation, que ce soit matériellement ou spirituellement. »

 

Il l’a exprimé d’une façon beaucoup plus simple, mais comme ces contacts spirituels se passaient sur des plans bien plus spirituels qu’intellectuels, j’expose ces dialogues sous une forme plus facilement compréhensible par le lecteur occidental.

 

La méditation des lamas – mis à part de rare exceptions dans le cas de lamas de type ermite qui peuvent véritablement méditer, mais qui n’ont pas du tout besoin de méditation, est de deux types différents. C’est soit une fausse méditation, une simple pose assise et immobile pour acquérir une réputation de sainteté, par des assoupissement et pieuses siestes, soit c’est une méditation de type « lutte », si bien décrite plus loin dans ce livre par mon ami ermite tibétain.

 

Le but de la méditation lamaïste est d’élever l’homme du monde « inférieur » de la matière au monde « supérieur » de l’esprit. Cela tend à finalement séparer l’esprit de la matière, tout comme l’attitude ultra-matérialiste occidentale tend à séparer la matière de l’esprit. Les deux attitudes, si je puis le dire avec respect, sont tout aussi insensées.

 

Dans la prétendue « méditation » toutes les idées qui surviennent au cours de la méditation et qui ne sont pas en conformité avec les « saintes » pensées sont chassées par des images mentales antagonistes à l’image mentale désirée par le lama. Les ermites tibétain qui ont vécu dans des monastères lors de périodes plus ou moins anciennes de leurs vies étaient en mesure de me donner de précieuses informations à ce sujet.

 

Le lama en méditation se rend à un endroit isolé (s’il y en a de disponible). Sinon, il s’isole simplement lui-même mentalement, où qu’il soit. Il adopte alors la sainte position, faisant très attention (…) [p.122-123]

 

La méditation des lamas et les pensées luxurieuses

 

(…) à ce que sa colonne vertébrale soit verticale, formant une ligne avec son cou, et que son nez soit juste au-dessus de son nombril. À chaque fois qu’il manque de concentration et qu’il sent que ses pensées commencent à s’égarer, il regarde son nombril. À chaque fois qu’il devient somnolant, il regarde la partie supérieure de son nez.

 

Toutes les pensées qui ne sont pas « saintes », qui émergent durant sa « méditation » doivent être combattues sans pitié par des images mentales appropriées.

 

Les pensées les plus communes qui dérangent la paix du lama en méditation sont censées être des pensées luxurieuses. Cela semble naturel. La vie sexuelle des lamas est dans la plupart des cas paralysée, et les désirs que les gens n’osent satisfaire par peur plutôt que par une compréhension profonde ont une tendance à quitter la conscience et avoir une forte emprise sur l’inconscient. Lorsqu’un lama commence à méditer il fait d’abord le « vide » dans son esprit. Et à chaque fois que l’esprit est « vide », l’inconscient commence tout de suite à travailler : toutes ces pensées indésirables déambulent vers la surface.

 

Lorsqu’alors le lama en méditation est assailli de pensées luxurieuses, il doit combattre ces images mentales par d’autres pensées provoquant le dégoût et l’horreur de la sensualité. Le lama concentre toute son attention sur une certaine partie de son corps et imagine qu’elle s’ulcère. Plus l’ulcère est déplaisant dans l’esprit du lama en méditation, plus cette difformité lui inspire d’horreur, plus c’est favorable à ses efforts religieux profonds. Puis le lama imagine que l’ulcère s’étend et couvre finalement tout son corps, émettant des quantités énormes de pus et de sang. Si cet exercice est accompli de la bonne manière, le lama doit réellement croire que tout son corps est ulcéré. Il doit sentir la douleur et l’agonie intense de sa condition. Il arrive que des lamas tombent vraiment malades en s’adonnant à de telles horribles images mentales. En certains cas la maladie peut devenir grave. Elle aura été provoquée par la simple auto-suggestion.

 

Après avoir vu son propre corps dans un état horrible et ulcéré le lama va un peu plus loin. Il imagine le monde entier peuplé d’une multitude d’êtres humains et son ulcère horrible commence aussi à ronger leurs propres corps, jusqu’à ce que tous les êtres humain vivant sur cette terre se transforment en un attroupement agonisant de corps ulcérés et endoloris.

 

Si le lama en méditation n’est pas tombé malade après ces horribles visions et a encore la force de poursuivre, il imagine que les ulcères rongent la chair humaine de tous les êtres humains vivant sur cette terre.

 

Ces exercices sont destinés à aider le lama en méditation à surmonter les tentations de la chair et à lui faire voir le (…) [p.124-125]

 

La méditation d’empathie envers tous les êtres souffrants est artificielle / Erreur de la séparation matière/esprit

 

(…) caractère éphémère et factice des plaisirs des sens. Ils tendent à emplir l’âme du lama de telles horreurs et d’un tel dégoût envers toutes les choses mondaines pour qu’il soit contraint d’être de plus en plus détaché de la matière et des tentations de la chair.

 

L’un des exercices de méditation des lamas, cependant, est plus beau. Il voit le côté positif des choses et le côté négatif. Il tend à éveiller l’amour et la sympathie.

 

Pour combattre l’insensibilité et le manque de sympathie envers les créatures souffrantes, un autre type d’exercice de méditation est enseigné aux lamas. Ils s’entrainent à imaginer des dizaines de milliers d’êtres hautement sensibles, à la fois des hommes et des animaux, en proie aux plus horribles affres. Leurs corps se tordent dans l’agonie, de misérables cris de douleur emplissent l’univers. C’est par son « oreille intérieure » que le lama doit en fait entendre ces cris de détresse. Ces cris deviennent de plus en plus tourmentés et enflent dans un hurlement d’agonie assourdissant.

 

Puis le lama en méditation tente d’évoquer des pensées de sympathie envers toutes ces créatures souffrantes. Comme il doit le faire de tout son coeur des larmes doivent jaillir de ses yeux. Puis il prendra – en imagination – ses larmes dans la paume de sa main gauche, les amènera près de son coeur, et les lancera en direction des créatures souffrantes. Ses larmes adouciront leurs douleurs comme par magie. Mais cela revient à pulvériser quelques gouttes d’eau dans une maison en feu. Le lama sent les énormes quantités de larmes requises pour étancher la soif de toutes ces créatures souffrantes, grâce à un peu de pitié et de sympathie. Alors le lama en méditation va pleurer et pleurer. Les larmes coulent sur son visage lorsque les visions prennent en intensité. Finalement ses larmes jaillissent de lui tel un ruisseau, puis le ruisseau devient rivière, et la rivière se transforme en de puissants flots dirigés vers tous ceux qui sont en agonie.

 

Bien que certains exercices de méditation soient superbes, ils ont néanmoins tendance à apporter des résultats par le biais de pratiques externes. C’est contraire aux voies des vrais ermites du Tibet. Ces derniers n’utilisent jamais de pratiques externes pour combattre les symptômes de l’imperfection humaine. Les ermites vont directement à la cause. Ils travaillent de l’intérieur, alors que les lamas méditants travaillent de l’extérieur vers l’intérieur.

 

A la grande différence des lamas, les ermites ne séparent pas la matière et l’esprit. Ils tentent de spiritualiser la matière, tandis que les lamas méditants tendent à séparer la matière et l’esprit pour détacher l’esprit de la matière.

 

La vie ne devrait pas être uniquement matérielle. Mais la vie ne peut pas être uniquement spirituelle non plus. Elle doit être les deux à la fois. Tout comme la conception ultra-matérialiste de la vie, si largement répandue en Occident, tend à détacher la matière de l’esprit, faisant ainsi de la vie une chose médiocre (…) [p.126-127]

 

Les ermites spiritualisent la matière / Les hommes sont plongés dans des rêves narcissiques / Médecine tibétaine

 

(…) les exercices de méditation d’Orient font la même erreur dans le sens inverse. La personne les pratiquant tend à séparer l’esprit de la matière.

 

Si l’on regarde avec attention les lamas quand ils ne méditent pas on découvre que dans les petites choses de leurs vies quotidiennes ils ne sont pas plus humains que les autres. Ils n’accordent leur gentillesse et sympathie qu’à certaines occasions. Ils ne sont pas constants, spontanés et simples comme l’est la douceur et la gentillesse dépourvue de condescendance des vrais ermites tibétains, qui tentent de comprendre la vraie signification de la matière et de la spiritualiser en saisissant son sens. Seules les personnes qui comprennent la vie, seules les personnes qui ont réalisé que la vie est à la fois matière et esprit et qui expriment continuellement la compréhension qu’ils ont dans leurs vies quotidiennes sont vraiment humaines.

 

L’humanité est quelque chose d’absolument nécessaire dans ce monde, qui meurt du manque d’amour. Nous avons besoin de personnes humaines, réellement et spontanément humaines, dans les petites choses de leurs vies quotidiennes. Nous avons assez d’idéalistes aux accès d’idéalisme occasionnels, qui piétinent le ver sur le sol en recherchant les étoiles.

 

Il y a une histoire sur un idéaliste occidental que sa femme a appelé au chevet de son père, en lui demandant de porter assistance aux souhaits du malade.

 

Lorsqu’elle est revenue quelques heures plus tard, son père était mort et l’idéaliste était assis dans l’infirmerie, traçant les plans d’un projet idéaliste pour aider le monde, dans lequel il était, bien sûr, le personnage central. Pendant que « l’idéaliste » faisait ses grands plans il avait complètement oublié l’homme mourant qui n’avait rien à boire et personne d’autre pour lui donner un peu d’attention !

 

La médecine officielle des tibétains est aux mains des lamas.

 

Un grand nombre de plantes médicinales poussent dans le sud du Tibet, dans la région himalayenne. Elles sont parfois utilisées par les lamas à des fins curatives, mais dans la plupart des cas les méthodes médicales des docteurs tibétains semblent assez ridicules aux yeux d’un occidental.

 

J’ai effectivement vu des lamas cracher sur des plaies ou pulvériser de l’eau sur le visage de leurs patients, sans rechercher de quoi ils souffraient.

 

La pharmacologie tibétaine se base sur des principes complètement différents de ceux de la branche analogue de la science occidentale.

 

Que penseriez-vous de cette ordonnance tibétaine ?

 

Prenez les reins d’un yack domestique et plongez les dans le sang. Puis écrivez avec le sang les quatre mots sacrés sur le sol. Après cela, mettez les reins dans un petit sac en peau de mouton, cousu au clair de lune. Remplissez (.) [p.128-129]

 

La médecine tibétaine, le contraire de la médecine occidentale / Mêmes excès, mêmes erreurs.

 

(…) le sac de bouse fraichement récoltée et fermez-le bien. Puis tournez sur vous-mêmes sept fois, en plaçant votre côté droit face au sac lorsque vous tournez. Puis ouvrez le sac dans une humeur pieuse et sortez les reins. Ils sont maintenant un médicament patent contre presque toute maladie.

Un occidental éduqué rirait de cela, mais c’est un fait qu’il y a trois cent ans le remède contre le rhumatisme reconnu par les facultés de médecine occidentale était l’administration de graisse de corps humain. Cette méthode pour soigner le rhumatisme était considérée comme infaillible par la science officielle médicale de l’époque.

Il n’y a pas très longtemps les saignées étaient considérées par la science occidentale comme un remède contre de nombreux maux. Aujourd’hui nous avons d’autres méthodes « infaillibles », comme la vaccination et ainsi de suite. Mais ces méthodes « infaillibles » cèderont la place à d’autres « infaillibilités » une fois que la mode médicale aura changée. Sur le long terme, nos méthodes scientifiques sont sujettes à la mode tout autant que l’est le sexe féminin.

Si l’on riait du lama tibétain qui prépare son remède de rein infaillible, il aurait tout autant de ressentiment que de nombreuses personnes en Occident qui se prennent très au sérieux, se considérant très en conformité avec les pensées de leur époque et leur milieu.

J’ai été très frappé par l’ignorance grossière des lamas tibétains sur les faits anatomiques. Cela semble très étrange dans un pays où découper les corps humains après la mort est une pratique répandue. Plus d’un lama, par exemple, imagine que c’est le rein qui fournit le liquide séminal et que la colonne vertébrale a un lien direct avec la partie supérieure du thorax ! À moins que les lamas prétendent qu’il faille que ces idées soient prises symboliquement, leur ignorance doit être épouvantable.

Il est très rare que la médecine tibétaine prenne un point de vue analytique. Elle n’envisage pas que les différentes parties du corps sont distinctes les unes des autres, mais elle traite synthétiquement de l’ensemble du corps. Les physiologistes tibétains les plus érudits parlent, comme m’ont dit les ermites, d’humeurs invisibles imprégnant le corps humain et circulant en lui. Selon les scientifiques tibétains, un état de déséquilibre de ces humeurs – le plus souvent apporté par des réactions psychiques ou des « fantômes », comme le disent les tibétains – cause la maladie, mais ils ne cherchent pratiquement jamais le siège de la maladie, et commencent à traiter le corps subtil invisible plutôt que le corps physique grossier.

Dans l’ensemble il semble que les tibétains errent dans le sens diamétralement opposé à la faute cardinale de la médecine occidentale, à savoir la spécialisation et localisation exagérée. Notre science médicale, dans l’ensemble, ne prend pas les choses de façon (…) [p.130-131]

 

Les hommes sages du Tibet ne partagent pas leurs remèdes

 

(…) suffisamment synthétique [holistique], alors que la science médicale des tibétains néglige totalement la localisation des sièges des maladies. Peut-être que la bonne voie se trouve quelque part entre ces deux extrêmes.

 

Un scientifique tibétain, par exemple, rirait d’un occidental qui essaye d’utiliser un désinfectant. Les tibétains disent que les épidémies sont provoquées par les mauvaises pensées et que les bonnes pensées constituent un désinfectant puissant.

 

À son tour, une personne en Occident rirait de cela. Mais les scientifiques occidentaux eux-mêmes ont certifié que les eaux de certaines rivières venant des régions himalayennes stoppent le développement de tout germe de maladie, et nombre de personnes que les tibétains estiment avoir de forts pouvoirs pour émettre de bonnes pensées vivent précisément dans cette région.

 

CHAPITRE VI

 

 

MIRACLES TIBÉTAINS

 

Les méthodes médicales « infaillibles » des guérisseurs professionnels sont à la disposition de quiconque voulant user de leurs services, qui sont, bien sûr, rendus contre paiement en espèce ou en nature. En revanche, les hommes sages du Tibet n’affirment jamais que leurs méthodes pour guérir les maladies sont infaillibles. Néanmoins ils possèdent des méthodes pour soigner les maladies qui ont des effets presque miraculeux, mais, contrairement aux habitudes des guérisseurs professionnels, ces hommes sages ne font jamais rien dans le but d’obtenir quelque chose, et refusent absolument de mettre à la disposition de tout le monde leurs méthodes merveilleuses pour soigner les maladies.

 

Aux yeux d’un occidental cette attitude semble être plutôt brutale et on doit examiner cela très attentivement, avec une très grande largeur d’esprit, pour trouver une explication et une excuse, mais laissez moi souligner le fait que ces hommes sages qui ressentent si intensivement la souffrance des autres le font dans un esprit de sacrifice.

 

J’eus mes premières expériences avec l’un de ces (…) [p.132-133]

 

L’accident d’un jeune homme et l’intervention miraculeuse d’un homme sage

 

(…) sages guérisseurs – je les avais déjà rencontrés avant, mais jamais vu dispenser des soins – dans le district de Tokdjalung, lorsqu’une pierre est tombée d’un flanc de montagne et aurait certainement tué un tibétain qui passait si un jeune homme, avec une grande présence d’esprit, ne l’avait pas poussé sur le côté au dernier moment, lui sauvant sa vie. Malheureusement le sauveteur se souciait tant de sauver la vie de l’étranger que dans son élan de générosité il en avait oublié sa propre sécurité. Une plus petite pierre, qui tomba juste après la grosse, a brutalement écorché son bras droit, de son épaule jusqu’à son poignet, déchirant sa peau et lui infligeant une profonde plaie dans sa chair, d’au moins cinquante centimètres de long.

 

Le pauvre homme souffrait d’une douleur terrible et perdait tellement de sang que ses habits en étaient trempés jusqu’à ses genoux, avant qu’aucun des témoins n’eut le temps de lui porter secours.

 

Personne n’avait quelque chose pouvant être utilisé comme pansement et j’allais à cet instant même prendre mon paquet de terre radio-active que je portais dans ma poche de chemise de mes habits tibétains, avec l’intention d’étendre son contenu sur la plaie et faire un pansement rudimentaire en prenant une partie de mes habits, lorsque je fus arrêté par un tibétain qui avait été témoin de l’accident. J’ai immédiatement noté le fait qu’il était scrupuleusement propre – un phénomène très étrange au Tibet – et toute son allure était majestueuse, et humble cependant – ce mélange étrange de pouvoir conscient et d’humilité qui caractérise tous les hommes réellement grands. Son visage n’était pas juvénile, et pourtant il n’avait presque pas de rides. Il avait des yeux noirs magnifiques, et des larmes de sympathie coulaient sur ses joues.

 

Lorsqu’il a dit, « Arrêtez ; laissez-moi faire, » cela ressemblait à une douce sollicitation, mais le son de sa voix cristalline semblait aller droit au coeur.

 

Il est allé près du jeune agonisant. Il a doucement touché ses cheveux et joues. Le sang coulait maintenant sur les habits de celui qui apportait son aide, mais il ne semblait pas y penser. Avec une tendresse infinie, il a caressé la tête du jeune homme. La douleur devait avoir disparue comme par un coup de baguette magie. Le garçon, qui gémissait de douleur quelques secondes auparavant, a levé les yeux et a souri.

 

Puis cette personne a saisi son bras et a fait des passes au-dessus. Je serais incapable de dire s’il a effectivement touché la plaie ensanglantée ou si sa main est passée au-dessus à environ trois centimètres de haut. Quoi qu’il en soit, le sang a instantanément arrêté de couler.

 

Puis la personne qui apportait son aide a déchiré un morceau de son propre habit qui – contrairement aux vêtements des (…) [p.134-135]

 

Discussion avec l’homme sage / A quoi sert de soigner si les leçons ne sont pas apprises ?

 

(…) autres tibétains – semblaient être constitué d’un seul morceau de tissu. Il a fait un pansement autour de la plaie. Le jeune homme continuait à sourire. Toute la douleur avait disparue comme par magie.

 

« Maintenant, mon cher garçon », a dit l’homme avec des yeux brillants, « va. Si tu as de bonnes pensées – et tu en auras, je ne doute pas, toi, gentille créature au bon coeur – ta plaie guérira en quelques jours. »

« Merci, » bredouilla le jeune homme.

« Ne me remercie pas, » répondit celui qui apportait son aide. « Remercie-toi toi-même. L’amour t’a guéri. Tu as donné de l’amour et l’amour t’a aidé. [i]Vis de telle sorte que je ne puisse jamais regretter de t’avoir aidé. Kale peb [Au revoir]. »

 

Ces mots, prononcés avec un amour et une gentillesse infinie, étaient aussi une injonction. Des larmes d’émotion et de gratitude coulèrent sur le visage du jeune homme lorsqu’il s’en est allé.

 

C’est étrange de le dire, mais les tibétains qui ont souvent des larmes de joie et de pitié, montrent rarement des larmes de douleur et n’expriment pas la tristesse ou l’angoisse mentale.

 

Les autres tibétains n’ont pas prononcé un mot. Ils n’ont pas osé regarder le saint homme, et lorsqu’il leur a dit « Au revoir » ils se sont retirés tremblants et frappés par la crainte de cette présence.

 

Je fus le seul à rester à l’endroit de cette guérison presque miraculeuse.

 

Il s’est un peu approché. Ses yeux magnifiques étincelaient. Quand j’ai regardé en eux, j’ai oublié le passé, le futur, et suis intensément devenu conscient du présent.

 

« Je dois faire un bon médecin, n’est-ce pas ? », demanda-t-il en souriant.

 

Comme c’est étrange ! Il avait exactement exprimé la pensée qui avait traversé mon esprit quelque secondes auparavant.

 

« Oui, » ai-je répondu. Quel était l’intérêt de garder l’attitude d’homme sourd-et-muet en la présence de quelqu’un qui pouvait lire dans les pensées des autres ?

 

« Et pourtant je ne guéris les gens qu’en des cas assez exceptionnels, » continua-t-il. « À quoi cela servirait si, par exemple, je soignais une personne tombée malade parce qu’elle mangeait excessivement ? Ceci dit, les gens ne se suralimentent pas aussi souvent au Tibet qu’en Occident. » Il me fit un grand coup d’oeil.

 

Je n’ai pas pu m’empêcher de me détourner légèrement de lui.

 

« Ne sois pas mal à l’aise, » me dit-il, « je ne te dénoncerai jamais. Les gens de mon type ne sont pas susceptible de trahir qui que ce soit. »

 

Je me suis senti plutôt rassuré.

 

« Eh bien, » continua-t-il, « Je ne dois guérir une personne malade par suite de suralimentation que dans le cas où je sens qu’elle ne recommencera pas à manger juste après avoir retrouvé la santé. Il y a des personnes qui utiliseraient l’aide donnée (…) [p.136-137]

 

On récolte ce que l’on sème / Ceux qui ouvrent contre les guerres fuient leurs propres faiblesses / Amour faible vs. Amour fort

 

(…) d’une telle façon qu’elles deviendraient encore plus néfastes pour les autres et encore plus cruelles pour leurs propres pauvres corps. Mais, » ajouta-t-il, « il y a des exceptions. Moi-même, je viens de guérir quelqu’un. Tu l’as vu. »

« Tu as pas aidé le jeune homme, » ai-je dit. « Aurais-tu aidé l’homme qu’il a sauvé ? »

« Ne pense pas que je sois brutal, ami, quand je te dis ne pas devoir l’aider. »

« Parles-tu sérieusement ? »

« Ce que je dis, je le dis toujours sérieusement. »

« N’est-ce pas une attitude sévère et cruelle ? »

« Cela peut le sembler si tu regardes les choses superficiellement. Mais en réalité, ce ne l’est pas. Tous les malheurs qui nous incombent sont de notre propre facture – le résultat de mauvaises pensées et les mauvaises actions. Nous récoltons ce que nous semons. L’homme pour qui la pierre était destinée fut sauvé cette fois, mais tôt ou tard il sera dans la même situation. Si ce n’est pas dans cette vie, ce sera dans une vie future. »

Et combien je comprenais cet homme ! Parfois je ne pouvais saisir le sens de plus de trois ou quatre mots dans toute une phrase, et pourtant je comprenais tout ce qu’il disait.

« Ne devrions-nous pas combattre le mal ? Ne devrions-nous pas combattre la guerre, par exemple, » lui ai-je demandé.

« La guerre est la conséquence de mauvaises pensées, de l’égoïsme de l’homme, » a-t-il répondu. « Nombre de personnes ont un coeur belliqueux. Ils combattent diversement, constamment, ceux qui sont autour d’eux, et en même temps ils parlent de paix. Si les gens sont contre la guerre parce qu’ils ont peur de la guerre leur résistance n’a pas de valeur. Nous ne devons pas combattre les symptômes, nous devons changer nos coeurs. »

J’ai réalisé que cet homme n’avait presque aucune chance d’être compris, quel que soit le pays dans lequel il fut.
La gentillesse des hommes sages du Tibet est une gentillesse qui vient de la force. C’est impersonnel dans le sens le plus large, c’est plein de justice et c’est le signe d’une vision étendue, tandis que la gentillesse des autres tibétains, notamment celle des nombreux prêtres, pèlerins, et soi-disant idéalistes, est une gentillesse née de la faiblesse. Elle est essentiellement bornée et égocentrique, ses effets sont globalement désastreux, parce qu’elle camoufle les symptômes, ce qui fait que les gens en oublient totalement leur situation intrinsèquement pourrie, venant de la mauvaise conception de la vie qui a produit ces symptômes.

 

Par rapport à la population totale du Tibet, qui s’élève probablement à plusieurs millions d’individus, le nombre de ces sages tibétains est excessivement petit. Il est probablement très inférieur à mille.

 

Ils sont grandement respectés par la population, bien qu’ils ne font jamais le moindre effort pour être populaire. [p.138-139]

 

Principes non-hiérarchiques de coopération parmi les ermites / Les faux-ermites qui recherchent un prestige égoïste

 

L’opinion des autres est tout à fait négligée par les hommes sages du Tibet, alors que les existences des autres tibétains, vides de sens, portent la marque des opinions d’autrui.

 

La popularité des hommes sages du Tibet est énorme. Le simple fait d’avoir obtenu le privilège de discuter avec eux confère une certaine distinction aux yeux de la masse des tibétains. Puisque certains tibétains m’avaient vu discuter avec l’homme saint après la guérison du jeune homme, cela pouvait me donner tant de prestige et me rendre l’objet de tant d’attention dans le district que l’homme sage – qui, bien sûr, savait que j’étais un occidental – m’a conseillé de quitter ce district aussi vite que possible, et m’a pour cela aidé par tous les moyens possibles.

 

Cependant, avant de partir avec lui, je lui ai demandé :

« Penses-tu être grand ? »

Il a souri. « Rien n’est élevé et rien n’est bas, mon ami, » a-t-il répondu. « L’insecte est tout aussi important qu’un petit homme ou un soi-disant grand homme. Il y a autant d’agitation dans une bouilloire d’eau bouillante que dans la création ou la destruction de l’univers. Tout est relatif. Il y a simplement le passage et l’éternel. Que restera-t-il des os du plus grand des hommes dans six mille ans ? Pas même leur mémoire ne peut survivre. Tout est relatif, mon ami. Je ne suis pas plus grand que l’oiseau dans le ciel ou le ver dans la terre. Seule la vie continue. La forme est immatérielle. »

 

Ces hommes ne veulent pas être respectés, pourtant ils sont respectés. Dans leur coeur ils sont comme des enfants, c’est-à-dire, espiègles et simples. Ils semblent éviter l’écueil majeur dans la voie d’une personne qui s’élève spirituellement, à savoir l’arrogance spirituelle. Ils sont des humbles serviteurs de l’humanité, sans aucune prétention, même subtile, d’avoir un rang spirituel ou une éminence propre.

 

Il y a des tibétains qui tirent avantage du grand prestige des vrais ermites du Tibet en faisant des efforts pour se donner une allure extérieure similaire, prétendant être de vrais ermites. Même les lamas trouvent souvent utile de prétendre être ermite afin d’accroître leur autorité. Ils se retirent dans la solitude pendant plusieurs années et deviennent « ermites » en dehors des monastères dans le but d’être mieux respecté et d’obtenir des promotions des rangs supérieurs du sacerdoce tibétain.

 

L’observateur attentif distinguera très facilement les deux types. Il y a une différence entre le vrai ermite tibétain et ceux qui prétendent être ermite à des buts égoïstes. Dans l’ensemble, les vrai ermites sont bien plus inaccessibles que les ermites de l’autre genre. Ils apparaissent seulement lorsqu’ils (…) [p.140-141]

 

Isolement et interactions des ermites avec la société / Faux et vrais ermites / Causes des souffrances du monde

 

(…) savent formellement qu’il est d’une certaine utilité de se montrer, dans de rares cas, pour enseigner ou aider quelqu’un.

 

Les voyageurs peuvent visiter les parties les plus inaccessibles du Tibet, là où les ermites vivent vraiment. Ils peuvent se rendre à quelques centaines de mètres seulement de leurs humbles demeures sans que jamais ils ne les rencontrent, si les ermites ne désirent pas se montrer. Les vrais ermites ne sont jamais de sortie pour satisfaire la curiosité des personnes. Ils donnent parfois des informations, mais lorsqu’ils font cela ils ont toujours des buts constructifs en vue.

 

Pratiquement tous les prétendus ermites du Tibet, qui vivent dans de petites cellules creusées dans le roc, et qui passent souvent de nombreuses années dans le noir total, ne sont pas des ermites authentiques. Tous les jours ces pseudo-ermites reçoivent de la nourriture et ne voient jamais la personne qui en apporte, pour que l’isolation soit complète.

 

Pour les vrais ermites, il n’est pas nécessaire de s’adonner à une pratique externe quelconque, comme de s’enfermer dans une obscure cellule, pour pouvoir se concentrer. S’ils se réfugient dans la solitude c’est dans le simple but d’éviter d’entrer en contact avec les curieux.

 

Cependant, toutes les véritables personnes de type « ermite » ne se montrent pas sous la forme visible d’un ermite. Certains d’entre eux ne vivent pas du tout dans la solitude et ressemblent à des êtres humains ordinaires, seuls les autres ermites peuvent donc les reconnaître. Il n’y a vraiment pas de signe extérieur qui permettrait de les reconnaître. C’est un fait curieux que parfois, lorsqu’il en ressent le besoin, un vrai sage ermite se glisse sous des habits crasseux. Il peut le faire, par exemple, dans le but de guérir les gens de l’adoration des formes visibles des grands hommes.

 

Il y a même un petit nombre de personnes du type « ermite » véritable qui vivent à l’intérieur des monastères tibétains, en tant que lamas. Les lamas, qui ont transformé la religion en business, ou qui sont « spirituels » parce qu’ils en attendent une récompense subtile, ne réaliseront jamais la vraie nature de l’autre mission et type de spiritualité. Il est probable que les lamas qui m’ont sauvé dans le monastère appartenaient à cette catégorie.

 

Les vrais ermites n’effrayent jamais délibérément les gens et n’essayent pas de leur faire croire en leurs pouvoirs ; mais les faux ermites font tout cela. Les ermites véritables n’ont rien à donner et rien à promettre. Ils peuvent seulement dire aux gens qui les approchent :

 

« Regardez le monde avec toutes ses horribles comédies et souffrances, à cause de l’ignorance humaine. Les gens sont égoïstes parce qu’ils pensent à tort que l’égoïsme est nécessaire à leur bonheur. Toutes ces recherches erronées du bonheur (…) [p.142-143]

 

Les possessions / La vie est tout ce dont nous avons besoin / Les ermites mangent peu / La lecture de pensée

 

(…) au prix de la souffrance infligée aux autres mènent seulement à de telles angoisse et de telles peines que si vous pouviez entendre en ce moment tous les cris et agonies dans l’univers vous ne pourriez pas être capable de le supporter, Cela vous déchirerait le coeur. Et vous, mon ami – qui savez tout cela – vous parvenez à rester à l’écart et ne rien faire ? N’atténuez pas les symptômes, mais allez droit à la cause. Changez votre coeur, et lorsque votre coeur sera changé, vous vivrez dans votre propre enseignement et influencerez le monde par votre exemple. »

 

Les véritables ermites déclarent ainsi que l’impulsion de changer de vie doit venir de l’intérieur. Il est mauvais, pour devenir saint, d’utiliser des pratiques extérieures. Ces dernières ne peuvent mener qu’à de courts moments de « sainteté » artificiellement maintenue qui donnent une excuse pour continuer d’être sans coeur.

 

« Est-ce que vous vous souciez de l’argent ou d’autres possessions ? » demanda-t-on un jour à l’un de ces véritables ermites, en ma présence.

« Non, » a-t-il répondu.

« Pourquoi ? »

« J’ai tout ce que je veux. »

« Mais comment l’avez-vous ? »

« La vie elle-même me donne tout ce que je veux. »

« Mais pourquoi la vie ne donne pas aux autres tout ce qu’ils veulent ? Il y a tant de personnes qui ont faim et prient pour un peu de nourriture ; il y a des gens qui ont cruellement besoin d’argent – et pourtant la vie ne leur donne pas cela. »

« La vie est juste, mon ami, » a répondit l’ermite. « Si la vie ne vous donne pas quelque chose la vie sait que vous en ferez mauvais usage ou que vous avez besoin de souffrir un moment. La plus grande catastrophe qui peut s’abattre sur la plupart des gens serait la satisfaction instantanée de tous leurs désirs, parce qu’ils désirent des choses pour leurs petits soi, et pas pour la vie en tant que tout. »

 

Les vrais ermites du Tibet mangent très peu. Et pourtant ils déclarent qu’ils ne font jamais aucun effort pour se priver de nourriture. Ils disent qu’ils ne jeunent pas parce que celui qui jeûne attend de recevoir quelque chose sous forme de récompense matérielle ou spirituelle. Ils semblent être si spirituels de l’intérieur qu’ils ont rarement faim.

 

Un jour j’ai carrément demandé à un ermite tibétain comment il avait appris à lire les pensées des autres.

 

« Je n’ai jamais fait l’effort de fouiller dans les pensées des autres, » m’a-t-il répondu. « Tout est venu de soi-même. J’ai brisé mon égocentrisme, et lorsque j’ai atteint de l’intérieur un état de conscience qui ne me permettrait jamais de profiter de ma capacité à lire les pensées des autres, j’ai pu les lire. Mais je n’ai jamais développé cette faculté par des exercices d’un type ou d’un autre. » [p.144-145]

 

Si la lecture de pensée était commune... / Ne pas utiliser des facultés superphysiques pour le physique / La tentation sexuelle est une mauvaise utilisation de l’énergie sexuelle qui est créatrice

 

« Beaucoup de gens voudraient être capable de lire dans les pensées des autres, » ai-je noté.

« Oui, » a-t-il répondu, « et si les gens égocentriques pouvaient pénétrer dans les pensées privées des autres le monde deviendrait encore plus épouvantable qu’il l’est actuellement. Ce serait comme de vivre dans une ville où tous les murs et cloisons étaient en verre. Ce serait uniquement possible dans un monde où les gens seraient désintéressés, jusqu’au point où ils s’abstiendraient même d’avoir un intérêt oisif pour les affaires des autres. »

« Moi-même, je ressens parfois les pensées des autres, » ai-je dit à l’ermite, « et je sais que ce n’est pas une sensation plaisante. »
« Si la lecture de pensée stimule la sympathie pour les problèmes des autres, c’est bien, » a-t-il répondu, « mais c’est malheureux si ça stimule le mépris. Et quand la lecture de pensée est développée par des pratiques extérieures, c’est généralement à cela que ça mène. Si la lecture de pensée vous vient de l’intérieur parce que vous aimez les autres si profondément que vous vous sentez un avec eux cela mène au premier [type de lecture de pensée] et alors il n’y a aucun risque que cette faculté soit utilisée à des buts égoïstes.

 

« Et gardez à l’esprit, » ajouta-t-il, « que le mot égoïste est utilisé dans le sens le plus large. Même si la faculté était utilisée pour se protéger soi-même et se défendre soi-même ce serait mauvais. Les facultés superphysiques ne doivent pas être utilisées à des fins physiques. Ce serait un crime.

 

« Plus grand est le pouvoir et la compréhension du monde spirituel, plus grandes sont les responsabilités de l’homme. Lorsque son pouvoir augmente il doit y avoir une augmentation réciproque d’amour et compassion et cela doit spontanément venir de l’intérieur. »

 

La vie sexuelle des ermites tibétains porte le sceau de l’abstinence. Nombre d’entre eux ne semblent pas avoir du tout de vie sexuelle. D’autres ermites semblent avoir réduit l’indulgence à un minimum incroyablement faible, qui équivaut, comme l’un d’entre eux m’a dit, au nombre de contacts d’un animal vivant en parfaite liberté, à savoir environ deux par an.

 

La forme la plus élevée d’énergie cosmique utilisée par un grand poète ou grand compositeur est essentiellement la même énergie que celle utilisée par le sexe. Un saint emploie ses énergies créatives d’une telle manière qu’elles sont utilisées de façon créative, ce qui en laisse peu ou pas du tout à un usage sexuel. Mais le faux saint ne dirige pas ces forces correctement. Puisqu’il n’est pas créatif il a un fort appétit sexuel, un phénomène qu’il considère être la tentation, par conséquent il travaille dur pour la supprimer par la peur et l’égoïsme.

 

Les vrais saints tibétains sont moraux parce qu’ils (…) [p.146-147]

 

Luxure réprimée par égoïsme / Ombre et lumière s’entremêlent dans les apparences / Juger les autres / Vivre son enseignement

 

(…) veulent être moraux, leur non-indulgence est naturelle et ne leur demande pas d’efforts. Mais la « vertu » des soi-disant saints est forcée et artificielle. Ils sont vertueux parce que leurs soi-disant vertus leur donnent des avantages, même si ces avantages sont d’une nature subtile, comme de s’imaginer assis sur un trône et regarder vers le bas les « pécheurs », qui leur donnent – si je puis dire – une sorte de jouissance perverse, ce qui paye pour leurs « vertus ».

 

Il y a une différence distincte entre l’abstinence naturelle et sans efforts d’un vrai saint et la sensualité artificiellement réprimée des soi-disant saints qui le sont pour des raisons égoïstes. Le nombre de vrais saints est infiniment plus petit que le nombre de ces derniers.

 

Dans certains monastères tibétains les moines doivent porter des dispositifs ingénieux destinés à estropier certaines parties de leurs corps pour les forcer à être « moral » en les privant de possibilités physiques d’être immoral. Une telle « sainteté » est bien-sûr grotesque, mais beaucoup d’autres sortes de cette sainteté forcée, apportée par la peur et la contrainte, reviennent au même, même s’il y a moins de brutalité apparente.

 

Combien l’ombre et la lumière s’entremêlent, et combien il est difficile de voir la réalité au travers de l’illusion des apparences ! Une action peut avoir exactement le même aspect – jeûne, non-indulgence, gentillesse, etc. – et cependant la chose la plus importante à son sujet, la motivation, peut être différente. Très souvent un acte brutal et un acte saint ont précisément le même aspect physique. Et pourtant, il y a tant de personnes qui prétendent être « spirituelles » et qui n’hésitent pas à juger les actions des autres !

 

Les vrais ermites tibétains ne jugent pas les autres, mais les faux saints ne manquent jamais une occasion de le faire. Le fait de juger les actions des autres est une excellente pierre de touche de la vraie et fausse spiritualité. Combien de personnes qui prétendent être « spirituelles » réussissent ce test ?

 

Dans un livre qui est si souvent lu et pourtant si rarement appliqué dans les petites choses de nos vies quotidiennes, il est écrit « ne juge pas ». Nous ne connaissons pas la chose la plus importante des actions des autres : leurs motivations. Donc ne nous laissons pas juger les autres. Jugeons-nous nous-mêmes. Nous connaissons les motivations de nos propres actions, et ce jugement est utile et très nécessaire.

 

Il est stupide de condamner les autres. La plupart des mauvaises actions sont dues à l’ignorance et pas à une réelle malignité. Si le monde n’est pas meilleur, c’est de notre propre faute parce que nous ne l’avons pas suffisamment influencé par notre exemple.

 

« L’exemple d’un homme est plus important que son enseignement. Nous devons vivre notre propre enseignement. » Cette expression donne en quelques mots l’attitude des vrais ermites tibétains. [p.148-149]

 

L’autorité naturelle est ermites, l’autorité artificielle des lamas / Résistance au froid des ermites

 

Les vrais ermites ont très peu de véritables élèves, et en certains cas ils n’en ont aucun, mais les faux ermites n’en ont jamais assez. À chaque fois qu’ils sont approchés par leurs élèves, ils mettent l’accent sur des cérémonies élaborées et salutations solennelles. Ils aiment souligner leur dignité et autorité par des marques extérieures de respect. Les vrais ermites mettent en lumière tout ce qui est forcé ou artificiel. Et pourtant leur attitude est impérieuse. Elle porte le sceau de la majesté simple de ceux qui sont vraiment grands, qui ne se soucient pas de leur apparence mais de ce qu’ils sont. On dit parfois que personne n’est grand dans les yeux de son valet. Eh bien, je me demande quelle pitoyable sorte de grandeur une telle affirmation doit impliquer. Plus on connait les vrais ermites tibétains dans les petites choses de leur vie quotidienne, plus on les respecte. C’est le type de respect qui est bien mérité et pas uniquement exigé.

 

L’autorité des faux ermites est minutieusement entretenue. Ils calculent les effets de tout ce qu’ils font. Les vrais ermites ne font pas cela.

 

Les premiers enseignent souvent à leurs élèves comment ils peuvent maintenir leur température corporelle dans le froid mordant des nuits tibétaines. Ils leurs enseignent des pratiques externes pour réaliser cet objectif.

 

La résistance des ermites tibétains aux effets du froid est remarquable. Bien qu’ils soient parfois pratiquement nus – et même s’ils portent des vêtements, ceux-ci ne sont pas en laine – je n’ai jamais vu de feu dans leurs habitacles. Même en été, le froid des nuits tibétaines est mordant, la température chute sous zéro.

 

Je les ai vu s’asseoir immobiles de longues heures dans un froid mordant. Ils ne semblent pas souffrir pour le moins des effets du froid, et l’on peut examiner en vain leurs corps à la recherche de trace visible d’exposition à une froide météo.

 

Pourquoi ne meurt-ils pas gelés ? Quel est le secret de cette résistance parfaite au froid ?

 

J’ai souvent dormi dans des tentes non-chauffées à des températures extrêmement basses et je sais par expérience que l’on souffre moins des effets d’une météo extrêmement froide si l’on est détendu. Je suis souvent allé en Laponie sans porter de chapeau à des températures allant de 20 à 30 degrés sous zéro, sans, par la suite, présenter de signes d’exposition au froid.

 

La relaxation semble être la chose essentielle pour acquérir une immunité contre les effets du froid. Cependant, il est impossible d’enseigner à quiconque, par des exercices, comment amener un état de relaxation absolue en toute sécurité, parce que l’état de relaxation physique doit être le résultat d’un état de relaxation psychique.

 

Moins on adopte une vision égocentrique de (…) [p.150-151]

 

L’égocentrisme maintient l’organisme dans un état psychique et physique de contraction

 

(…) la vie, moins on sépare tout ce qu’il y a dans la vie entre le « moi » et le « non-moi », plus on est détendu psychiquement, et plus la relaxation physique s’ensuit automatiquement. Plus nous sommes égocentriques, plus nous maintenons l’âme et le corps dans un état de tension. Si nous considérons la vie en terme d’avoir au lieu de la considérer en terme d’être, l’état perpétuel de vouloir obtenir quelque chose nous place dans un état de contraction, à la fois psychiquement et physiquement.

 

Les vrais saints tibétains ne veulent rien avoir, quoi que ce soit. Ils prennent la vie en terme d’être, non en terme d’avoir.

 

Si vous regardez un magnifique couché de soleil ou écoutez une merveilleuse musique et oubliez totalement que vous êtes M. ou Mme. Tel-ou-Tel, vous ne désirez rien pour M. ou Mme. Tel-ou-Tel ; en ces moments vous ressentez la félicité de l’impersonnel. Vous ne voulez pas avoir le couché de soleil pour vous-mêmes et en priver les autres, vous ne voulez pas posséder la superbe musique, et pourtant vous vous sentez heureux et connaissez la félicité de l’absolu désintéressement qui ne cherche aucune récompense, quelle qu’elle soit, pour le fait d’être désintéressé. C’est la vraie spiritualité.

 

Et si vous vous maintenez à cette conception de la vie, même pendant les tourments et difficultés de la vie quotidienne, vous vivez la vie des vrais saints, ces êtres simples et réellement humains pour qui la religion est une chose vivante, pas simplement une hypocrisie ou théorie.

 

La résistance remarquable au froid des vrais saints du Tibet, de ce fait, est une conséquence d’une relaxation psychique et physique parfaite due à leur conception non-égocentrique de la vie.

 

Et qu’en est-il des autres, les soi-disant saints ?

 

Ils savent que le temps froid n’a aucune emprise sur les vrais saints et ils tentent de les singer, puisqu’ils savent qu’il est avantageux de vaincre les effets du froid afin d’impressionner les autres par leurs pouvoirs. Ils s’efforcent donc d’amener un état de relaxation par certaines pratiques couplées à des exercices psychiques.

 

Dans les deux cas le résultat est assez extraordinaire, la maîtrise des effets du froid est complète.

 

Aussi dangereux que soient les pratiques des soi-disant saints pour les tibétains, elles sont encore plus dangereuses pour les occidentaux, dont le système nerveux est bien plus susceptible d’être atteint que celui des tibétains.

 

Le système nerveux des tibétains, a, sans doute, acquis une certaine résistance aux effets nocifs de ces pratiques, puisque ces choses ont été pratiqué depuis des générations. Le système nerveux de l’homme blanc est bien plus exposé à ces effets par l’absence d’adaptations héréditaires graduelles. De plus, la vie pénible en Orient met d’elle-même (…) [p.152-153]

 

Utilisation des pouvoirs surnaturels par les saints et lamas / Les recherche de pouvoirs psychiques des lamas

 

(…) un lourd fardeau sur la résistance nerveuse de l’homme blanc, qui serait très mal avisée de s’exposer à une terrible pression supplémentaire sur ses nerfs. Je ne doute pas que toute personne blanche égocentrique qui tente de mener à bien ces pratiques se détruirait elle-même tôt ou tard, et pour les quelques personnes non-égocentriques, il n’est d’aucune utilité pour eux de les pratiquer.

 

Les vrais saints semblent capable de maîtriser les forces de la Nature, bien qu’ils ne montrent jamais qu’ils possèdent ces pouvoirs. Ils ne feraient jamais de démonstration de ces derniers dans l’unique but de convaincre un sceptique, ou pour satisfaire une simple curiosité. De plus, j’ai de bonnes raisons de croire qu’ils n’utiliseraient pas même ces pouvoirs en légitime défense. Aussi, leur faculté de pénétration parfaite des pensées des autres, dont j’eus la preuve à maintes reprises lorsque je suis entré en contact avec eux au Tibet, n’est jamais utilisée à des fins égoïstes, et en m’exprimant ainsi je donne au mot « égoïsme » le plus large sens possible. Je ne doute pas que si les faux saints possédaient la faculté de lire mes pensées, ils n’aurait pas hésité un instant à me dénoncer aux lamas.

 

Ces faux saints s’arrangent parfois pour gouverner les forces de la Nature à petite échelle, mais dans presque tous les cas le travail effectué à cette fin leur est si nocif et les épuise si terriblement qu’ils font des miracles le plus rarement possible, et à chaque fois qu’ils ont l’occasion d’en faire ils les remplacent par un tour habile d’une scène de music-hall. Il y a, indubitablement, de véritables phénomènes psychiques au Tibet, mais ils sont très rares, et un très grand nombre de prétendus cas de phénomènes doivent être passés en revue avant qu’un cas authentique, stupéfiant l’observateur le plus sceptique, puisse être découvert. Les personnes qui imaginent que les lamas volants sont nombreux au Tibet se méprennent. On doit garder les yeux grand ouverts pendant de nombreuses semaines, avant même de rencontrer un seul de ces lamas volants, et alors, le phénomène est si rapide qu’il ne permet pas une observation prolongée.

 

Je n’ai vu des lamas volants qu’à deux reprises. La distance la plus proche entre le long-gom-pa et moi était une fois d’environ quarante mètres et une autre fois, de seulement huit à dix mètres. Dans les deux cas le phénomène présentait pratiquement le même aspect. Les mains et pieds du lama balançaient en un va et vient comme un pendule. La vitesse à laquelle il progressait était époustouflante, et dans le cas où le lama était à seulement dix mètres de distance, l’aperçu que j’ai eu de lui était suffisant pour me permettre (…) [p.154-155]

 

Les lamas volants / Les preuves photographiques de phénomènes psi sont inutiles / Fantômes

 

(…) d’assurer qu’il n’était pas à bout de souffle. J’eus l’impression qu’il était dans un état de transe, son visage ressemblait un peu à celui des médiums occidentaux authentiques – nous n’avons probablement que trente bons médiums dans l’Europe et l’Amérique réunie – mais je ne pouvais pas m’empêcher de ressentir que le lama était dans un état de transe plus conscient et plus entier que les médiums occidentaux. À en juger par l’examen minutieux des empreintes de pas, le poids de son corps devait avoir dans une certaine mesure diminué, bien que je ne puisse pas donner d’estimation. Mon appareil photo a été détruit par des voleurs, et même si j’étais encore capable de l’utiliser, la lumière n’aurait pas été assez bonne pour prendre une photographie d’une personne se déplaçant à une vitesse d’au moins vingt-cinq kilomètres/heure. Une seconde fois, lorsque j’ai rencontré un lama volant, la lumière était bonne pour prendre un instantané à environ un ou deux centièmes de secondes, mais je n’étais pas le seul à regarder ce phénomène, donc même si mon appareil photo était encore en état de marche, il aurait été impossible de prendre une photographie sans attirer la curiosité et la suspicion des tibétains.

 

Je n’ai pas eu l’occasion de regretter la destruction de mon appareil photo, parce que je sais par expérience que, de toute manière, la preuve photographique d’un phénomène psychique est très rarement d’une grande utilité.

 

Il y a de nombreuses années j’ai été ravi d’obtenir des images authentiques de fantômes lors de séances [de spiritisme] en Occident. J’ai ensuite pris un nombre égal de photos truquées de fantômes en prenant trois ou quatre photographies sur la même plaque. Ensuite, j’ai mélangé les deux séries de photographies de fantômes, que j’ai donné à des personnes qui ont eu une grande expérience pratique pour juger les phénomènes psychiques, leur demandant de trouver les photos authentiques parmi les fausses. Ils ont échoué misérablement. Ils ont avancé que beaucoup de fausses photographies étaient vraies, et ont avancé qu’à peu près autant d’images de fantômes authentiques étaient truquées !

 

L’expérimentation de phénomènes psychiques par des appareils adéquats est une façon bien plus fiable de connaître leur réalité. L’explorateur voyageant déguisé est handicapé par l’impossibilité d’utiliser des instruments conçus dans le but de ces recherches psychiques. J’ai donné des conférences sur les phénomènes psychiques du Tibet aux membres de diverses Associations de Recherches Psychiques en Scandinavie, Hollande, et dans d’autres pays, et après mes conférences j’étais toujours prêt à répondre à des questions sur les moindres détails de mes expériences au Tibet. Cependant, lorsque les faits de phénomènes psychiques sont présentés pour être examinés, nous ne devons pas perdre de vue le fait que même dans les pays occidentaux, (…) [p.156-157]

 

Le développement forcé de pouvoirs occultes mène à l’effondrement / Les occultistes tibétains / Clairvoyance et clairaudiance

 

(…) où des installations considérables existent pour effectuer des recherches de ce genre, les plus grands cerveaux de cette époque sont toujours en désaccord sur le fait d’admettre ou non les preuves concernant la réalité des phénomènes psychiques.

 

Personnellement, je suis enclin à croire que si un individu concentre sa force de volonté – et des énergies, durant une période de disons vingt ans – sur la seule tâche de produire un phénomène occulte particulier, comme de léviter à quelques pieds de hauteur, il devrait réussir, bien qu’il puisse avoir à payer très cher cet accomplissement en ruinant peu à peu sa santé et son équilibre nerveux. Mais pour réaliser un tel résultat, je ne pense pas que, disons, une demi heure de travail par jour pendant vingt ans soient suffisants. Il doit vraiment concentrer toutes ses énergies, toute sa force de volonté, et tout son temps sur cette fin.

 

Et si une personne égocentrique réussit finalement à s’élever dans les airs, je pense que l’ultime punition pour ce barbotage égoïste dans l’occultisme sera – l’auto-destruction.

 

Les occultistes noirs du Tibet, à savoir les personnes qui s’engagent dans la pratique dangereuse de l’utilisation de pouvoirs occultes à des fins égoïstes, inspirent peur et horreur aux tibétains. Les plus puissants d’entre eux sont censés posséder le sombre pouvoir de tuer des gens à une distance de plusieurs centaines de mètres, en leur envoyant une sorte de flèche subtile invisible faite de substance fine dont se compose le corps subtil invisible (voir Chapitre V). Ceci peut, bien sûr, être exagéré, mais il semble qu’il est indubitable que ces hommes puissent faire du tort s’ils le choisissent. Cependant, ils doivent être très minutieux dans le choix de leurs victimes, parce qu’il est un fait reconnu par tous les occultistes qu’un homme absolument désintéressé et sans crainte ne peut pas être blessé par des influences adverses, et que toute influence hostile destinée à lui faire du tort rebondira automatiquement vers la personne qui tente de la blesser. Ce dernier agirait comme un homme qui lance une balle contre un mur pour l’endommager, et qui en retour la reçoit sur son nez.

 

Certains faux saints du Tibet ont réussi à développer la clairvoyance et clairaudiance à un très faible degré, mais les vrais ermites possèdent ces pouvoirs de façon extraordinaire. J’ai assez souvent croisé des faux saints au Tibet, et aucun d’entre eux ne pouvait savoir que je n’étais pas tibétain. À deux ou trois reprises seulement ils semblaient vaguement sentir qu’il y avait quelque chose d’inhabituel chez moi.

 

La croyance dans l’existence d’une aura, le nuage invisible entourant nos corps physiques denses (…) [p.158-159]

 

Aura et clairvoyance / Réalité des phénomènes psychiques / Influence hypnotique des foules

 

(…) est plutôt courante au Tibet. On dit que l’aura n’est visible qu’aux clairvoyants. « Visible » n’est pas le terme correct cependant. Le clairvoyant sent l’aura. Dans la plupart des cas il ne la voit pas, mais perçoit l’aura avec tout son corps éthérique.

 

Il est difficile de traduire les expériences d’un clairvoyant dans un langage conçu pour la description des choses physiques. Supposons qu’une personne normale essaye de décrire à une audience de personnes aveugles ce qu’est le jaune, le rouge, ou le bleu ! Sa description serait tout aussi inadéquate que les termes utilisés par un clairvoyant pour décrire quelque chose à une audience qui ne l’a jamais expérimenté.

 

Il est, naturellement, simple de se retirer de l’ensemble du problème de la clairvoyance en déclarant que tout cela est une fumisterie. Je ne pense pas que se justifie la manière simple et commode de traiter avec des faits inopportuns, car parfois, lorsqu’une personne rend visite à plusieurs clairvoyants qui ne se connaissent pas et vivent dans des districts différents, ils donnent des descriptions de son aura qui correspondent étroitement.

 

Il y a des clairvoyants authentiques au Tibet, mais ils ne semblent pas être très nombreux. Les faux clairvoyants, en revanche, abondent. On croit, par exemple, que chaque lama de haut rang possède la faculté de clairvoyance, et la plupart des lamas âgés tentent de faire croire aux gens qu’ils sont clairvoyants, afin de rehausser leur autorité.

 

En entrant en contact avec le type d’individu au Tibet qui pense qu’il a absolument besoin d’un miracle pour faciliter son business spirituel, les explorateurs doivent être sur leurs gardes. Il y a des cas où les « sorciers » tibétains ne semblent pas hésiter à utiliser leurs pouvoirs hypnotiques pour faire « voir » à leur audience des choses qui n’existent pas. De ce fait, une grande précaution est nécessaire, de cet angle également, lorsque l’on considère les soi-disant miracles tibétains. À chaque fois que c’est possible, les traces matérielles même si elles sont très légères – doivent être examinées une fois le phénomène passé. L’auteur a évité de se mêler à une foule en étudiant de tels phénomènes, à chaque fois, bien sûr, que ce fut possible sans attirer l’attention. Même s’il peut n’y avoir aucune influence hypnotique présente, ce n’est pas une bonne chose de se mêler aux foules. Les personnes désireuses de maintenir une attitude indépendante et objective devraient rester à bonne distance.

 

Cependant, même si toutes ces réserves et exceptions à la réalité des phénomènes tibétains sont pris en considération, la réalité certaine de la transmission de pensée sur des distances assez importantes et de phénomènes moins frappants comme la psychométrie, etc, est incontestable. [p.160-161]

 

La météo trouble les phénomènes psi / Sur le scepticisme / Trucages

 

Nombre de mes lecteurs seront surpris d’apprendre que parfois les phénomènes qui peuvent être produits à 3000 mètres ne se produisent pas à 4000 mètres. Il y a des phénomènes qui ne peuvent être produits qu’avec un temps clair, et un changement subséquent des conditions météo paralyse entièrement le « sorcier ». Cela ne veut-il pas dire que ces « miracles » sont soumis aux lois bien fondées de la Nature, et qu’il n’y a rien de vraiment miraculeux ?

 

Une fois, il était plutôt évident que les facultés psychométriques étaient considérablement troublées par un temps pluvieux. J’avais enveloppé divers petits objets dans un tissu et ai montré les paquets à un tibétain réputé pour ses pouvoirs de psychométrie. Il pouvait toujours me dire, au moins approximativement, ce que contenait le linge sans ouvrir le paquet. En une occasion j’avais placé la dent d’un animal à l’intérieur. Lorsque je lui ai demandé de me dire ce qui y était caché, sa réponse était :

 

« Quelque chose qui fait mal ! »

 

Sa réponse était correcte, bien qu’incorrecte si elle est prise à la lettre. De nombreuses questions sont tout aussi vagues.

 

Un changement subséquent dans la météo paralysait entièrement ses facultés psychométriques, et il n’a pas pu les récupérer avant que le temps ne change à nouveau.

 

Même sous les conditions les plus favorables, considérer les phénomènes psychiques est une question difficile. Les réponses sont souvent presque justes. De plus, le fait que quelqu’un regarde le phénomène avec un scepticisme hostile peut paralyser toute l’affaire, et rien ne peut arriver. Nombre de personnes considèrent les phénomènes psychiques comme un juge qui a une sentence de prête avant le procès. Ils regardent les phénomènes avec le jugement « fumisterie » déjà bien établie dans leurs esprits. Comme un scientifique bien connu m’a une fois : « Ils ne souhaitent pas admettre une chose qu’ils ne parviennent pas à comprendre ». Le scepticisme est nécessaire, c’est une très bonne chose, lorsqu’il est question de juger un phénomène psychique, mais le scepticisme hostile va bien trop loin.

 

Non seulement les prétendus ermites au Tibet produisent occasionnellement des miracles – dans des cas plutôt exceptionnels, apparemment des miracles authentiques, dans la plupart des cas des truqués – mais aussi, certains des lamas dans les monastères. Spécialement avec ces derniers, les quelques phénomènes apparemment authentiques sont littéralement inondés de l’énorme quantité de trucages de music-hall, et parfois des types d’escroqueries les plus grossières.

 

Il y a un vénérable prêtre, par exemple, qui fait annoncer à ses élèves qu’il peut s’élever dans les airs à volonté en réduisant à néant le poids de son vénérable corps. Plusieurs (…) [p.162-163]

 

Attitude des foules envers les lamas / L’arnaque des chaussures "miracles" vendues par les lamas

 

(…) centaines d’enthousiastes vont chaque jour regarder le phénomène. N’est-il pas sympathique et énergisant de voir un homme saint s’élever plusieurs fois dans les airs et revenir au sol presque immédiatement après ?

 

Les foules curieuses, sous l’emprise d’un état de dévotion pieuse et craintive, se sont rassemblées pour former une cellule soigneusement close. Elles ne pouvaient pas voir ce qu’il se passait à l’intérieur, mais de temps en temps elles entendaient l’impact du corps humain chutant sur le sol. Aux yeux de la foule tibétaine c’était une preuve concluante de la réalité du phénomène. Elle croyait que c’était un miracle, la rendant aussi généreuse que possible dans ses contributions pour les dépenses de la vie du lama et des élèves. Leur crédulité puérile est peut-être associée à une certaine quantité de peur envers cet homme si puissant, pour qui même les forces de la Nature sont supposées être obéissantes.

 

Un occidental civilisé pourrait sourire. Mais trop souvent les occidentaux, lorsqu’ils sont attroupés ensemble, ne sont pas plus critiques que les foules tibétaines.

 

En certains cas les prêtres tibétains n’hésitent pas à arrondir leurs revenus en vendant des chaussures « miracle » qui sont supposées porter la personne au-dessus des rivières et des lacs, l’empêchant de couler.

 

Ces chaussures sont comme les chaussures de feutre tibétaines ordinaires, mais elles sont excessivement chères. On informe les acheteurs potentiels que la vente des chaussures est sujette à deux conditions. Premièrement, le prix de vente doit être payé avant que les chaussures ne soient essayées, et deuxièmement, les chaussures miracles doivent être testées seul, en l’absence de témoins.

 

Au moment même où un lama vendait des chaussures miracles à une foule de tibétains crédules, cinq ou six personnes, qui en avaient acheté quelques heures plus tôt, sont revenues, afin de protester, puisqu’ils avaient découvert que les chaussures étaient inutiles. Ils ont essayé de marcher à la surface de l’eau avec des résultats désastreux. « Rimpotshé » (saint père), a dit l’un d’entre eux au lama en présence de la foule, « vous m’avez vendu cette paire de chaussure, et j’ai soigneusement respecté vos instructions. J’ai payé le prix à l’avance et personne d’autre n’était présent quand je les ai essayé.

« Et maintenant je reviens pour protester, » continua-t-il, « puisque les chaussures n’ont pas fonctionné et qu’elles ne sont d’aucune utilité. »

 

On aurait dû s’attendre à ce que le pieux lama soit embarrassé en entendant cette protestation en la présence d’une importante foule, mais il était plutôt tranquille. [p.164-165]

 

Les tibétains constamment dupés / Pouvoir moral des lamas

 

« As-tu réellement coulé, ami ? » a-t-il demandé légèrement.

« Oui, » répondit le tibétain, « et je me suis quasiment noyé. Je suis allé dans la rivière aussi rapidement qu’une personne portant des chaussures ordinaires. »

Un murmure se répandit dans la foule. Le lama éleva sa voix.

« Je vais vous dire pourquoi ces chaussures n’ont aucune utilité pour vous, » a-t-il dit. « Les chaussures miracle sont sacrées, et si des pécheurs les portent, elles perdent tout leur pouvoir magique. Je marche toujours avec elles à la surface des rivières et lacs s’il n’y a pas de témoin présent, et si une autre personne qui n’est pas un trop mauvais pécheur se conforme à mes instructions et les essaye seul, elles marchent toujours. »

 

Le tibétain fut grandement humilié d’avoir été décrit comme un mauvais pécheur en la présence de l’importante foule, et le lama continua, parlant de plus en plus fort, présentant le pauvre type comme un exemple vivant d’un homme menant une vie pécheresse. Il ne fallut pas longtemps avant que le tibétain, qui s’était courageusement avancé pour protester, se prosterne littéralement jusqu’à ses talons, accompagné par les autres quelques tibétains qui étaient aussi revenus pour protester. Ils ont tous pris la fuite, et le pieux lama a tranquillement continué son business.

 

Plus il y a de charlatanisme dans un monastère tibétain, plus la foule est grande. On ne peut pas s’empêcher de penser que de ce fait, la plupart des tibétains aiment être roulés et qu’ils créent les charlatans par le désir qu’ils ont d’être roulés.

 

Peut-être est-ce pour cela que les hommes sages du Tibet ne réussissent pas à changer le Tibet. [p.166-167]

 

Ce qu’est la jeunesse / Pourquoi les hommes vivent plus longtemps mais perdent leur jeunesse plus rapidement / Les ermites sont toujours jeunes

 

CHAPITRE VII

 

LA JEUNESSE ÉTERNELLE

 

Il n’y a rien de plus merveilleux que la jeunesse, l’enthousiasme de la jeunesse, la capacité de ressentir profondément et d’expérimenter l’extase profonde de la vie. Est-il inévitable que nous devions perdre cette glorieuse chose, lentement et inexorablement ?

 

L’art de rester jeune est une toute autre affaire que de simplement prolonger nos vies.

 

À l’époque de la guerre de Trente Ans, lorsque des pays entiers en Europe perdirent quasiment la moitié de leur population en raison de la guerre, la famine, et la peste, la vie moyenne de l’homme était de – dix ans. Lors du dernier siècle elle était de trente à quarante ans. Aujourd’hui elle est de presque de soixante ans, et des scientifiques sérieux parlent de la possibilité que, très bientôt, la durée de vie moyenne de l’humanité se prolonge à quatre-vingt dix ans.

 

Hélas ! tout ce progrès est plus apparent que réel. Les statistiques ne déclarent pas à quel âge l’homme commence à être vieux. L’homme vivant disons il y a 300 ans restait jeune plus longtemps que nos contemporains.

 

Dans ce monde de remontants et de plaisirs tout-faits, dans ce monde d’une vie prétendument « intense » qui est dans la plupart des cas rien de plus que la recherche de vitesse et de sensation pour oublier son propre malheur et sa propre terrible vacuité, l’homme et la femme vieillissent beaucoup trop vite. La plupart des personnes vieillissent et se désillusionnent très tôt. Même si la vie elle-même ne disparait pas, la plus grande chose sur terre, la Jeunesse, est rapidement perdue.

 

Les masses au Tibet font d’autres erreurs, généralement de nature « spirituelle », et vieillissent aussi prématurément, mais les vrais ermites tibétains réussissent à rester jeune presque indéfiniment. Il y a des rumeurs au Tibet que certains de ces hommes ont cinq ou six cent ans, mais de telles histoires pourraient ou non être vraies. Il est impossible de vérifier l’âge d’un homme quand il est supposé avoir plusieurs centaines d’années d’âge, puisqu’il a survécu à tous ses témoins.

 

Cependant, certains de ces hommes, qui ressemblent à des hommes en pleine santé d’environ trente-cinq ans d’âge, doivent avoir au moins cent ans d’âge, puisque nombre de personnes âgées qui vivent dans le même district ont vu ces hommes pendant cinquante, soixante ans ou plus et déclarent qu’ils n’ont pas changé d’apparence durant cette période et qu’ils n’ont certainement pas vieilli.

 

Quel est le secret de cette jeunesse pratiquement éternelle ?

 

La meilleure opportunité pour étudier un tel homme me fut offerte lorsque je suis resté cinq jours dans (…) [p.168-169]

 

Vie avec les ermites / La jeunesse est détruite par la peur, la peur venant du service-de-soi

 

(…) l’habitacle d’un frère de l’un de mes meilleurs amis au Tibet. Ils sont tous deux des ermites qui semblent posséder le pouvoir de se maintenir jeunes presque indéfiniment. L’un d’entre eux vit au sud du désert de Gobi. Par hasard, ce fut cet homme qui m’a fourni des vêtements tibétains et a beaucoup amélioré mon accent par de fabuleux exercices de prononciation. Son frère vit dans le Tibet du Sud-Est, et ce fut ce dernier qui m’a offert l’hospitalité de son logis.

 

Ces ermites ne partagent pas l’idée, si commune parmi les soi-disant saints du Tibet, que la saleté est une signe de sainteté. Ils sont tout aussi propres extérieurement qu’intérieurement. Leurs habits ne sont ni opulents ni excessivement haillonneux. Seuls quelques uns sont exceptionnellement grands, et bien qu’ils mangent très peu – souvent rien si la météo est claire et belle – ils ne sont pas très minces. Il faut reconnaître, cependant, qu’ils ne semblent pas avoir un grain de matière grasse.

 

Il y avait une merveilleuse atmosphère de sérénité dans les logis de mes amis tibétains. Il y avait une atmosphère magnifique de réelle hospitalité – une hospitalité si naturelle et simple que l’on se sentait immédiatement chez soi.

 

Pendant trois jours après mon arrivée il n’avait pratiquement pas mangé, et je commençais à me demander si c’était son jeûne qui préservait si longtemps sa jeunesse. Il ressemblait à un homme de trente ans environ, et il se comportait parfois comme un jeune garçon. Aussi, ses yeux étaient plutôt ceux d’un enfant que ceux d’un homme de pleine maturité. Son âge réel – à en juger par les déclarations de nombreuses personnes âgées qui l’avaient vu il y a des décennies – devait être de quatre-vingt dix ans au moins.

 

Il n’y avait rien de solennel ou d’intimidant en lui, et un matin lorsque nous nous poussions mutuellement et facétieusement pour faire des exercices, j’ai tenu son corps. Il était élastique et souple, comme le corps d’un garçons de dix-neuf ans.

 

Je me suis à nouveau demandé si sa très faible alimentation avait quelque chose à voir avec son apparence de jeunesse. J’y avais juste pensé, sans lui demander. Il a souri, m’a pleinement regardé avec ses yeux brillants, qui changeaient continuellement d’expression, et m’a dit :

« Ce n’est pas le jeûne qui me fait rester jeune, mon ami. »

 

« Pourquoi mangez-vous si peu, alors ? » ai-je demandé.

« Parce que nous n’avons pratiquement jamais faim, » a-t-il répondu.

« Maintenant, écoute moi avec attention, » continua-t-il, après une petite pause. « Dès l’instant où tu fais un effort pour rester jeune, tu vieillis. Dès l’instant même où tu fais un effort pour garder quelque chose, tu as peur de le perdre. Et la peur empoisonne un homme, quoi qu’il fasse et quoi qu’il mange. C’est la peur qui détruit la jeunesse des gens. » [p.170-171]

 

Ce qu’est la liberté / Combattre les symptômes de l’égoïsme n’apporte aucune amélioration / Brothers and Sisters of Sorrow (Frères et Soeurs de la Peine)

 

« N’oublie pas que dans la vie tout est relatif, et qu’il n’y a pas de valeurs absolues. Même le bien et le mal n’existent pas réellement. Rien n’est vraiment bien ou vraiment mal. Tout dépend de comment on utilise une chose. Vous ne pouvez pas rester jeune par certaines pratiques. Si vous vieillissez dans le coeur, l’âge physique survient rapidement, quoi que l’on mange ou que l’on fasse pour rester jeune.

 

Et qu’est la jeunesse ? C’est la liberté envers les préjugés, la liberté envers les manières habituelles de penser ou manières habituelles de vivre. Donc aussi longtemps que nous sommes spontanés, aimants, et enthousiastes nous sommes jeunes.

 

« C’est très simple, » ai-je osé remarquer. « Mais nombre de personnes aimeraient une liqueur miraculeuse leur donnant la vie éternelle. »

« Précisément, » a-t-il répondu, « mais une chose telle qu’un élixir apportant la jeunesse éternelle n’existe pas.

« Ne pense pas que je suis brutal lorsque je dis que je te montre le monde tel qu’il est réellement. Si nous donnons au monde un élixir de vie éternelle nous ne ferions qu’empirer les choses. Nombre de personnes utilisent leurs vies pour faire du tort aux autres, tout en faisant de brefs efforts pour être bon, ayant ainsi une excuse pour être néfastes tout le reste du temps. Et que dire du problème du chômage ? » ajouta-t-il avec un grand clin d’oeil, montrant qu’il en savait plus sur l’Occident que je ne l’imaginais. « Et que dire du problème de la surpopulation ? » Sa voix devint infiniment triste.

« Dans un monde où l’homme est l’ennemi de l’homme, une vie prolongée ne créerait que des problèmes en plus. Rallonger la vie des personnes sans changer leur coeur ne ferait qu’augmenter les troubles du monde qui sont provoqués par l’attitude erronée des individus qui cherchent leur propre bonheur aux dépends du bonheur des autres. En combattant simplement les symptômes d’un trouble – y compris le vieil âge prématuré – nous n’améliorons pas les choses. Nous avons combattu les symptômes de l’égoïsme depuis des siècles, et en dépit de cela le monde est devenu de plus en plus malheureux.

 

« Êtes-vous heureux ? » ai-je demandé.

Des larmes coulèrent sur son visage lorsqu’il formula sa réponse. « Non, je ne le suis pas. Les gens de mon type sont souvent dans une solitude à briser le coeur, si vous regardez cela d’un angle strictement humain. J’aime les autres, et pourtant je sens que ce que je peux faire pour eux est infiniment peu. Il y a un profonde tragédie en cela. Je ne peux pas être heureux avant que le monde entier le soit, et il y a un long calvaire, un clavaire infiniment long, encore à venir avant que ce but ne soit atteint. »

 

Je n’ai soudainement pas pu m’empêcher de penser à une conversation sur les plaisirs du paradis et les souffrances des damnés que j’avais eu avec un théologien érudit. [p.172-173]

 

La vie vaut-elle la peine d’être vécue ? / Que faire pour le monde ? Réponses de style Marciniak / Tout ce qu’il faut est de comprendre

 

Il semblait avoir le sentiment qu’il ne faille pas vraiment craindre l’enfer tant qu’on n’est soi-même pas certain d’aller au paradis. Mais revenons à ma conversation.

 

« Est-ce que la vie vaut la peine d’être vécue ? » ai-je demandé à l’ermite.

« Oui, » répondit-il « la Vie est grande la Vie est glorieuse, il y a toujours cette alternative entre les sommets vertigineux et les affreux abîmes. Tout est relatif et il n’y a aucune certitude. Si vous vous rendez compte que vous pouvez vivre avec le coeur d’un jeune garçon. C’est seulement si vous vivez avec le coeur d’un jeune garçon que la vie vaut la peine d’être vécue. Alors vous connaissez beaucoup de choses et pourtant vous ne vous sentez pas supérieur. Je ne pense pas que je suis un individu exceptionnel ; je suis juste un humble serviteur de l’humanité. Je vis et j’aime. »

 

« Que peut-on faire pour le monde ? » ai-je demandé.

« Nous pouvons être des signaux indicateurs, montrant la route à ceux qui tâtonnent dans le noir. Mais malheur à eux s’ils commencent à nous vénérer. Si les gens attendent des signaux indicateurs pour les aider, ces signaux indicateurs deviennent leurs plus grands obstacles. »

« Mais comment allons-nous influencer les autres, concrètement ? »

« La plupart des gens contribuent d’une façon ou d’une autre aux souffrances du monde – souvent sans même le savoir eux-mêmes, » a-t-il répondu.

« Tout ce qu’un homme sincère peut faire est ne pas co-opérer avec quoi que ce soit qu’il considère comme stupide, quoi qu’en soit le résultat pour sa vie et ses biens. »

Il se mit soudainement à rire comme un espiègle jeune garçon coquin, ses explosions de vivacité contrastant étrangement avec son sérieux quelques instants auparavant. « Je dois rire, » dit-il, « lorsque j’utilise le mot « biens », puisque je n’ai pas de biens. Je n’ai rien, donc je ne crains pas de perdre quoi que ce soit.

 

« Devrions-nous recommander aux gens de rechercher la pauvreté ? » ai-je demandé.

« Non. Il n’y a pas d’inconvénient à la richesse si les gens ne se cramponnent pas à elle. »

« Alors que le mépris de l’argent, des richesses, et du pouvoir n’a pas besoin d’être un premier pas ? »

« Non. Cela vient tout seul, une fois que les gens ont compris la vie. »

« Quel devrait être le premier pas, alors ? »

« Se comprendre soi-même. Il est bien plus facile de comprendre les autres qu’il l’est de se comprendre soi. Ne penses-tu pas qu’il est plus facile pour quelqu’un de comprendre l’enfant d’une autre personne, qu’il l’est de comprendre son propre enfant ? Plus il y a d’intérêt partial et égoïste pour une chose que nous sommes, plus il est difficile de comprendre. N’y a-t-il rien de plus difficile de se juger objectivement soi-même ? Dis aux gens de devenir pleinement conscients d’eux-mêmes. Dis-leur de continuellement enquêter sur leurs propres motivations, d’être ouvertement brutal envers eux-mêmes. [p.174-175]

 

Le repas des ermites / L’utilisation insensée du progrès par la civilisation

 

Cela peut fournir une première incitation à la prise de conscience de sa propre incomplétude et ainsi un premier pas vers la compréhension.

 

« Après tout, c’est très simple. Aime ! Aime plus et plus intensément. Et si ton amour est libre du poison de l’égocentrisme tu ne te sentiras pas supérieur parce que tu es une compréhension plus profonde. Si le réel amour engendre la compréhension, cette compréhension sera exempte du terrible piège de l’arrogance spirituelle.

 

Mon sage ami faisait tout lui-même. L’heure du repas était arrivée, et il a préparé notre nourriture. J’ai reçu un petit repas d’orge avec des radis secs, alors que son menu était constitué de peut-être deux ou trois cuillerées à thé d’un mélange d’herbes que ses amis avaient ramené pour lui des Himalayas.

 

« J’ai reçu un petit sac de celles-ci il y a trois mois, » me dit-il. « Il y en a encore plein dedans. »

« Peu d’occidentaux seraient satisfaits d’un tel repas, » ai-je observé.

« Je ne suggère pas un instant qu’ils devraient manger une telle nourriture. Il y a beaucoup de bien dans tout le progrès de la civilisation, » répondit-il, « mais les gens en font du gâchis. Plus ils inventent de machines, plus ils compliquent la vie. De sorte qu’en fin de compte, cela ne les améliore pas.

« Je devrais avoir l’esprit d’utiliser des machines ici, » ajouta-t-il. « Pourquoi devrai-je travailler une heure par jour pour mes vêtements si je peux faire le même travail avec une machine en dix minutes ? »

« Eh bien, pourquoi n’en prends-tu pas une ? »

« Ici, je deviendrais trop ostentatoire si j’utilisais des machines, » a-t-il répondu, « et alors j’accélèrerais la marche de la pénétration occidentale ici au Tibet, qui a déjà commencé près des frontières du pays, et aussi en certaines parties du district de Lhassa. »

« As-tu un lien avec le district de Lhassa ? » lui demandai-je, plutôt surpris. « Je pensais que ce district était l’un des plus isolés du Tibet. »

« Peu importe comment j’obtiens mes informations, » répliqua-t-il avec intention. « Si tu vas toi-même au district de Lhassa, tu peux vérifier que j’ai raison.

« Mais tu ne peux pas y aller pendant ce voyage. Ce serait dangereux, puisque tu devrais pour cela voyager déguisé dans un district où de nombreuses personnes blanches ont déjà été vues par les habitants.

« Peut-être devrais-je y aller lors de ma prochaine visite au Tibet dans cinq ou six ans, » ai-je dis.

« Ne te précipites pas autant à faire des plans, mon ami » me dit-il. « Il peut y avoir de gigantesques bouleversements interférant avec tes plans, bien que rien ne soit définitivement déterminé pour l’instant. Tout dépend (…) [p.176-177]

 

Matière et Esprits : toujours des excès / Les faux ermites de l’île du lac qui fuient la Matière

 

(…) de ce que fait chacun de nous. Une bonne pensée peut faire pencher la balance dans du bon côté.

« Pourquoi ne souhaites-tu pas que le progrès occidental pénètre au Tibet ? » demandais-je ?

« L’Occident fait une horrible erreur en donnant une importance excessive à la matière. Cette partie du monde fait l’erreur opposée. Le Tibet fuit l’aspect matériel. En amenant les machines ici nous ferions pencher la balance de l’autre côté, et les gens deviendraient inévitablement matérialistes.

« Une nouvelle conception de la vie est nécessaire dans le monde entier, » continua-t-il plus fortement ; comme s’il m’avait complètement oublié et parlait à l’humanité toute entière. « L’Occident fuit l’Esprit et l’Orient fuit la Matière. Les rares personnes qui font un effort en Occident pour être religieuses sont semblables aux quelques types en Orient, qui fuient également la Matière. Et les rares personnes en Orient qui, par un effort, rompent avec ce qu’ils appellent religion deviennent matérialistes comme la plupart des occidentaux.

 

« À moins que nous créions une nouvelle conception de la vie, » continua-t-il, « l’Orient et l’Occident sont tous deux condamnés. Nous avons besoin d’un nouveau type d’humanité qui soit à la fois Matière et Esprit. Il n’y a que de telles personnes qui peuvent être humaines. Une personne fuyant la Matière ou l’Esprit, ne l’est jamais. »

 

Il me conduisit à la porte de son logis. Un paysage splendide se tint sous nos yeux. L’air était aussi clair que le cristal. À une distance d’environ douze kilomètres, à environ 800 mètres en contrebas, il y avait un lac de montagne.

 

Mon ami tibétain me montra une île sur le lac. Il me raconta que des ermites tibétains vivaient sur cette île, et que la population considérait que c’était en leur devoir de leur apporter de la nourriture. Le lac était gelé durant tout l’hiver jusqu’à la fin du printemps, et l’approvisionnement en nourriture était facile à fournir jusque là. Mais lorsque l’été arrivait la glace fondait, et les radeaux ne pouvaient pas encore être utilisés, puisque les radeaux tibétains sont constitués de sacs en peau gonflés.

 

Alors des gens risquaient leur vie pour apporter de la nourriture aux ermites en marchant à la surface de la glace fondante. Les soi-disant ermites considèrent que leurs prières sont plus efficaces sur l’île qu’ailleurs, et ne veulent pas prier autre part, même au prix de mettre en péril la vie d’autres personnes.

 

« Ici tu vois un exemple de gens qui fuient la Matière. » m’a dit mon ami. « Ils prient, et sont bons lorsqu’ils prient, mais ne sont pas bons dans leurs vies quotidiennes. Peux-tu imaginer un être vraiment humain prier sur l’île, et, (…) [p.178-179]

 

Les idéalistes narcissiques / Les gens qui essayent d’être bons sans être conscients / Les ermites ne souhaitent rien, ils ont tout

 

(…) ce faisant, forcer d’autres personnes à risquer leurs vies en marchant sur la glace ?

 

« Méfie-toi des gens qui pensent qu’ils sont bons, mon ami, » ajouta-t-il. « Dans la plupart des cas nous sommes pires lorsque nous imaginons que nous sommes bons. »

 

J’ai pensé aux idéalistes cruels et aux guerres de religion. J’ai pensé au fait que lors des derniers siècles un grand nombre de systèmes ont été fondé pour aider les autres et les rendre meilleurs, et qu’en dépit de cela le monde semble être un véritable asile de stupidité et d’horrible souffrance.

 

Nombre d’entre nous essayent d’être « bons », mais souvent nous sommes bons que pour quelques minutes de ci de là, et nos idéaux et brefs moments de gentillesse et bienveillance ne font que nous fournir une excuse pour être des égoïstes hypocrites tout le reste du temps. Nombre d’entre nous sommes idéalistes parce que cela nous sert bien d’être idéaliste. Un tel idéalisme n’a absolument aucune valeur. Au contraire, cela contribue à masquer les symptômes, empêchant ainsi le monde de voir les causes sous-jacentes de nos problèmes.

 

Combattons l’égoïsme et l’imperfection en nous-mêmes et non chez les autres. Le monde serait bien meilleur et bien plus humain si les gens se consacraient à se juger eux-mêmes seulement le dixième des énergies qu’ils gaspillent en jugeant les autres par la pensée, la parole, et l’action.

 

Contrairement à la majorité des tibétains qui découvrent comment ils auraient dû vivre qu’au moment où leurs vies sont presque passées, les vrais ermites tibétains ont le courage de vivre leurs propres vies sans se tourner vers les habitudes et préjugés. Lorsqu’ils sont en vie, ils sont toujours amoureux de la vie. Leur perspective sur la vie est une réalité vivante et dynamique.

 

Ils ne souhaitent rien, pas même une longue vie, la santé ou le bonheur. Ils vivent juste sans paralyser leurs vies ou permettre qu’elles soient paralysées par d’autres, et cette attitude demande une bonne dose de détermination dans le monde. Ils sont bienveillants envers tout ce qu’ils traitent – bien qu’ils peuvent parfois être durs envers des individus s’ils pensent que la vie dans son ensemble l’exige – et cet « ensemble » comprend aussi leurs propres corps. Ils ne se maltraitent jamais. Ils ne désirent rien, et pourtant tout leur est donné.

 

Curieusement, le fait qu’ils ne désirent rien semble associé à une force de volonté inébranlable, mais cette force de volonté n’est jamais utilisée du point de vue du « moi », mais toujours du point de vue de tout ce qui comprend aussi le « moi ».

 

Ils sont très sages, probablement juste par le fait qu’ils n’accumulent pas le savoir comme un avare accumule l’or. Ils ne jugent les choses pas seulement avec leur cerveau, mais avec leur cerveau et leur coeur. Et cela est la sagesse – (…) [p.180-181]

 

Le savoir et la sagesse / La civilisation occidentale, bonne ou mauvaise ? / Méfiez-vous de ceux qui se disent "bons"

 

(…) à savoir, pas uniquement l’accumulation et le catalogage d’innombrables détails, mais la compréhension de liens vitaux. Quelqu’un qui tuerait les spécimens de toutes les espèces inconnues d’animaux au Tibet, par exemple, ne serait pas plus sage en les examinant de façon très approfondie.

 

Notre civilisation, avec tous ses apprentissages, équipements et perfectionnements techniques en perpétuelle évolution, nous a-t-elle rendu sages et heureux ? Est-ce que notre énorme connaissance et information nous a rendu plus sages que ces ermites tibétains ? Certainement pas. Car nous avons uniquement accumulés des savoirs et nous manquons de sagesse pour intégrer tous ces savoirs et tous ces perfectionnements à des buts constructifs et bons.

 

Dans certaines parties du Tibet, où l’information sur l’Occident est disponible, même un type ordinaire ne voudrait pas la civilisation occidentale.

 

« Cela n’apporte que malheur et discorde, » disent-ils. « On n’en veut pas ici. »

 

Allons-nous détruire la civilisation et grimper aux arbres parce que nous ne sommes pas assez intelligent pour l’utiliser comme elle devrait être utilisée ? Si le coeur de l’homme change, la civilisation cessera de conquérir ses propres fins. Après tout, la civilisation est-elle bonne ou mauvaise ? Rien n’est bon ou mauvais. Tout dépend de comment nous en faisons usage.

 

L’aspect technique et scientifique de la civilisation a évolué à un rythme stupéfiant, mais pendant ces temps de progression matérielle rapide le coeur de l’homme n’a presque pas changé, en dépit de siècles entiers à parler d’amour et de fraternité. Il y a-t-il vraiment une différence entre l’homme qui allait au cirque il y a 1800 ans pour voir des gens se faire réduire en pièce par des lions, et l’homme moderne qui va au cirque lorsqu’il attend que l’acrobate se casse le cou ?

 

Tous les tibétains qui vendent des drogues spirituelles défendent la croyance que si l’on s’approche d’une très sainte personne, le seul fait d’être à proximité d’elle nous aidera automatiquement, et sera d’un bénéfice spirituel.

 

Dans le monde de la spiritualité réelle il ne peut y avoir aucun « avantage ». Même la présence d’un grand être dynamique ne nous aide pas automatiquement. Cela libère simplement tout ce qui est caché en nous, et pas seulement nos côtés lumineux, mais aussi les autres. Peu se demandent pourquoi les vrais ermites sont si réticents à rencontrer la foule curieuse.

 

Les vrais ermites ne se disent jamais « saints ». Méfiez-vous de ceux qui font un tel effort pour vous convaincre qu’ils sont bons et moraux. Si quelqu’un est vraiment vertueux, il n’a pas besoin de souligner ce fait.

 

Une fois seulement j’ai demandé à un saint tibétain s’il était vertueux. Sa réponse fut – un rire joyeux ! Et pourtant je suis convaincu qu’il n’a jamais péché. Le principe directeur de sa vie était l’amour. Il (…) [p.182-183]

 

Ne jamais être satisfait / La vérité ne peut être qu’objective / Le piège de l’arrogance spirituelle / Les hommes sages ne font pas d’efforts pour paraître "gentils" / Respect du libre-arbitre

 

(…) n’a jamais fait aux autres ce qu’il ne voulait pas que les autres lui fassent. C’était son code moral, m’a-t-il dit par la suite.

 

Cet ermite qui, bien sûr, savait aussi que j’étais une personne blanche, m’a donné des réponses à de très vitales questions.

 

« Dis-moi si tu as trouvé la Réalité, » lui ai-je demandé.

« La Réalité, la Vérité, la Vie, Dieu, l’Éternité, l’Amour tout-embrassant – tout cela est la même chose, » a-t-il répondu. « Tu ne peux pas trouver la vérité. Dès l’instant où vous avez votre vérité, ce n’est plus la vérité.

« Aussi longtemps que nous vivons nous devons être en quête, » continua-t-il. « La vie n’aurait pas de sens s’il y avait quoi que ce soit de certain. Plus tu es poussé par la vie, mieux c’est. Ne sois jamais satisfait, surtout avec toi-même. »

« N’y a-t-il pas de principe directeur ? » ai-je demandé.

« Il y en a un, » a-t-il dit, tandis que ses yeux s’illuminaient d’un amour et d’une compassion infinie, « le principe directeur devrait être l’AMOUR. Si tu lui es fidèle, il te montre le bon chemin. »

 

Nous venions de la vallée dans laquelle j’avais traversé la rivière grâce à mon dispositif flottant juste avant de le rencontrer. Après avoir répondu à mes dernières questions, il augmenta sa vitesse. J’ai fait de même. Je peux marcher à neuf kilomètres/heure sans courir. Mais le tibétain marchait encore plus vite !

 

« N’y a-t-il pas de piège sur la route ? » ai-je demandé.

« Il y en a un. Le plus terrible de tous les péchés : l’arrogance spirituelle. Si l’amour ouvre ton coeur à une compréhension plus profonde et que tu abuses de la lumière ainsi donnée en te sentant supérieur et méprisant envers les autres, alors tu commets le plus grand péché contre ton vrai moi. »

 

Il augmenta encore sa vitesse. Maintenant, à onze kilomètres/heures, je ne pouvais plus le suivre sans courir. J’ai réalisé qu’il souhaitait être seul. Les nalliorpas tibétains ne font jamais d’effort pour être « gentil ». Ils n’hésitent pas à être ferme s’ils veulent clore une discussion.

 

Je me suis arrêté un instant et ai regardé derrière moi. Lorsque je me suis retourné quelques secondes plus tard il était sorti de mon champ de vision. Ce fut peut-être mon expérience la plus étrange de mes voyages en Asie.

 

Maintenant il était de nouveau seul physiquement, mais il était probablement en contact avec tous les coins de l’univers, par télépathie. Imaginez un homme qui en sait autant, qui est incommensurablement sage, et pourtant incapable d’aider ses congénères directement.

 

Ces hommes n’essayant jamais d’influencer le libre-arbitre des autres. La vie n’a pas de sens si nous devenons juste des marionnettes, suivant automatiquement les diktats des chefs spirituels, même s’ils (…) [p.184-185]

 

L’homme créé ses propres limites / Le temps provient de limites apportées par le service-de-soi / Le faux et le vrai Nirvana : ce n’est pas une annihilation mais un changement de conscience

 

(…) sont très puissants et sages. L’homme a le choix entre le plus grand bien et le mal le plus horrible. Son destin se tient dans ses propres mains. C’est la gloire de l’homme. Un jour il se sauvera lui-même par son propre effort et deviendra comme les hommes sages du Tibet. Ils sont analogues à des signaux indicateurs. Ils le disent eux-mêmes.

 

L’homme crée ses propres limites. Il doit lui-même détruire les choses qu’ils a créé. Les ermites peuvent montrer aux enfants comment ils marchent, mais s’ils les portent dans leurs bras, les enfants n’apprendraient jamais à marcher.

 

Les vrais ermites sont au-delà de la critique. S’ils sont loués ou blâmés, ils ne s’en soucient pas. L’opinion des autres, qui est pour la plupart des tibétains tellement importante que leurs vies entières portent le sceau de pensées automatiques et préjugés de l’époque dans laquelle ils vivent, ne semble en aucune manière influencer les hommes sages du Tibet.

 

Ces hommes spontanément altruistes, qui ne font de leur altruisme aucune vertu, mais qui sont continuellement, sans faire d’efforts, bienveillants et compatissants, semblent avoir conquis la mort. Ils sont « éternels », voyant que la notion même de temps n’existe que dans la mesure où les individus tracent une ligne entre le « moi » et le « non-moi » et considèrent tout en relation avec leur petit moi.

 

Et puisqu’ils sont « éternels » dans le sens indiqué ci-dessus, ces hommes n’ont pas peur de la mort, bien que leur « moi » ne croit pas en un quelconque paradis personnel où ils pourraient être confortablement logés.

 

Cependant, ces hommes sont pleinement conscients d’être des entités distinctes et séparées et n’abandonnent pas leur Âme. Ils sont et restent de fortes personnalités qui travaillent à l’amour envers les autres.

 

Et cela est le Nirvana, le vrai Nirvana, pour lequel tant de fausses notions prévalent, non seulement dans les pays occidentaux mais aussi en Orient, puisque le vrai Nirvana est souvent confondu avec le faux Nirvana qui est une fabrication des prêtres. Le faux Nirvana est l’abolissement et la négation de la vie, mais le vrai Nirvana est son plein épanouissement par la spiritualisation de la matière, au lieu d’une fuite ou d’une exagération excessive de son importance.

 

Le vrai Nirvana est un état dans lequel l’homme est tout et rien en même temps. C’est un état d’être qui est au-delà de la mort, au-delà de la peur de la mort. Ce remplacement d’un égoïsme volontairement limité du « moi » par un désintéressement illimité n’est pas une annihilation mais un différent état de conscience. Un tel « moi » se met lui-même volontairement à la disposition du monde et travaille pour le monde, parce qu’il se sent un avec les joies et les tristesses du monde et non parce qu’une récompense égoïste lui est promise, même subtilement. [186-187]

 

Tout est en nous / Le systèmes et les dogmes corrompent la lumière / Les signes des temps, le choix offert à l’humanité

 

Pour comprendre la vraie signification du vrai Nirvana, on doit l’approcher par le cerveau et par le coeur. Ce ne peut pas être disséqué comme une fleur morte, puisque le vrai Nirvana est la réalité vivante.

 

Il y a une référence au vrai Nirvana dans le Nouveau Testament. « Le Royaume des Cieux n’est pas ici ou là. Il est en vous. » Le vrai ciel est la disparition complète de l’égocentrisme dans le sens le plus large du terme.

 

Les hommes sages du Tibet ne se disent jamais bouddhistes ni n’affirment être les successeurs ou représentants de Bouddha. Ils pourraient donner la main aux très rares Chrétiens qui vivent constamment l’esprit de la Bible dans les petites choses de leurs vies quotidiennes.

 

Bouddha a apporté une grande et rayonnante lumière. En donnant aux gens une petite lumière « ersatz« , ses soi-disant représentants ont complètement mis en échec les buts du Bouddha vivant. Si toutes ces fausses lumières n’avaient pas existé et qu’il y avait une obscurité spirituelle totale, les gens en tant qu’individus rechercheraient la vraie lumière qui resplendit partout et gratuitement, si seulement nous ouvrons à elle nos esprits et nos coeurs.

 

Il y a une énorme différence entre la majorité des soi-disant bouddhistes, qui ont l’idée d’un soi-disant Nirvana qui pend devant leurs yeux et les ravit hors de la matière, et les quelques hommes sages du Tibet qui sont dans un état de vrai Nirvana ici sur terre. Ces derniers réalisent pleinement l’esprit au sein de la matière. Avec ces hommes, la religion est une chose constructive et vivante, et pas un moyen de rendre les gens faibles et moutonneux.

 

Le bouddhisme dogmatique est une distorsion organisée de l’esprit du Bouddha vivant.

 

Est-ce pour toujours, ou est-ce qu’une spiritualité réelle sera comprise un jour au Tibet ?

 

L’Asie est à la croisée des chemins. L’humanité est à la croisée des chemins. Une nouvelle conception de la vie est nécessaire si ce monde ne doit pas périr.

 

« C’est l’alternative entre les sommets vertigineux et les terribles abîmes. » Tels furent les mots de l’un des hommes sages du Tibet. Cela ne s’applique pas seulement au destin d’individus, mais aussi au destin de l’Humanité.

 

Les signes des temps annoncent un nouvel âge. Il est à portée de main. Sera-t-il meilleur, sera-t-il encore plus horrible que le précédent ? Le précipice est à quelques mètres du sommet. Chacun d’entre nous contribue en une certaine mesure au cours que prendront les évènements. Soyons conscient de notre responsabilité.

 

Les hommes sages du Tibet regardent les évènements, mais comme ils l’ont eux-même dit, ils sont seulement des signaux indicateurs. Ils n’interfèrent pas avec le libre-arbitre des gens, puisque l’homme est essentiellement libre de choisir sa voie vers la lumière rayonnante ou l’obscurité complète. C’est là que réside sa gloire. [p.188-189]

 

Fin

 

Plus nous en apprenons spirituellement plus notre responsabilité est grande. Il y a une étincelle d’amour désintéressé ancré dans le plus profond de nos coeurs. Elle nous garde en harmonie avec notre Âme, notre vrai soi. Si l’Âme nous guide, l’Amour sans aucune arrière-pensée de récompense spirituelle est le principe directeur de nos vies, et chaque accroissement de connaissance et pouvoir est automatiquement équilibré par un accroissement correspondant de notre sens des responsabilités et notre Humilité.

 

C’est la leçon suprême que j’ai apprise en étudiant la vie spirituelle du Tibet.

 

FIN

Source

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